Ce matin-là, Lydia n'avait pas cours. La veille, elle avait eut une rencontre assez explosive avec son amie, Layla. En y repensant, cette-dernière avait agit de façon totalement différente de ses habitudes, ce qui avait laissé un goût amer à la demoiselle. Elle se questionnait, repassait chaque moment de la scène dans sa tête, répétait toutes les phrases, jusqu'à la ponctuation. Mais rien n'y faisait, elle ne comprenait guère l'attitude de la jolie blonde. Lâchant un long soupire dans son lit, elle continuait de fixer le plafond. Il était bien rare qu'elle ne reste ainsi à ne rien faire, hier encore, pour occuper ses minutes qui allaient se perdre dans inefficacité, la jeune femme était sortie. Et c'est alors là qu'elle l'avait croisée... Ca se répétait. Elle était de nouveau dans le même scénario.
Se redressant, nerveuse, elle se mordit comme à son habitude la lèvre inférieure, jusqu'à la faire un peu saigner. Mince.
Elle se revoyait, possédait par la colère et son pouvoir qui ne voulait que s'échapper, baffer violemment de cette main électrique son amie.
Lydia secoua la tête, pas question de se remémorer ces mauvais moments. Vivre dans le passé ne servait à rien, il fallait trouver une solution radicale à ce problème de magie non-maîtrisé. Se levant, déterminée, et après s'être préparée, la sorcière se dirigea vers la bibliothèque, espérant que cette fois-ci, elle soit ouverte.
C'était le cas, sans plus attendre, elle pénétra dans la salle et fouillant les étagères trouva peu à peu son bonheur. Elle avait sélectionné des tonnes de bouquins, sur comment contrôler un pouvoir, des potions contre la magie -au cas où elle serait obligée de l'annihiler totalement- et bien d'autres du même genre. Un autre lui tomba sous la main "la possession". Cet intitulé lui fit directement penser à son amie... Non, impossible. De plus, elle n'était pas là pour ça. Ces souvenirs l'agaçant un peu, elle remit d'un coup l'oeuvre à sa place. Mais l'enfonçant un peu trop, sous le coup de la colère, ce-dernier en poussa un autre qui tomba de l'autre côté de l'étagère.
" BAM ". Bizarrement, ce n'était pas vers le sol que le son retentit. Les yeux écarquillés d'une enfant fautive, Lydia ne bougeait pas, attendant une réaction de l'autre côté, en espérant n'avoir percuté personne.
A cet instant présent, elle se sentit tellement idiote et maladroite, que ses songes arrêtèrent de se tourner vers Layla, pour enfin se consacrer à un sujet moins grave.  

De l'autre côté, un homme semblait s'être pris le libre. Elle pouvait entendre la réaction de ce malheureux, et si l’événement susciterait le rire chez certains, Lydia quant à elle, se sentit affreusement honteuse. Elle passa ses mains sur ses joues -celles-ci ayant pris une couleur bien rougeâtre- tout en s'insultant continuellement intérieurement. Poussant quelques bouquins, sur le côté cette fois-ci afin de ne pas en assommer un autre, elle regarda d'un oeil (presque) discret sa victime. Il s'agissait d'un adulte, et ce-dernier n'avait pas l'air de bien comprendre ce qui lui était arrivé... Tant mieux, intimidée par les autres, la demoiselle ne se sentait pas la force de faire face à des reproches. D'un autre côté sa conscience, bonne et droite, lui criait de ne pas se défiler et d'au moins présenter ses excuses.
Bien vite, elle se fit remarquer, et lorsqu'il lui adressa la parole, son premier réflexe fut de sursauté. Mais rien ne justifiait cette petite peur, car seul un mouchoir avait été demandé. Remettant les livres à leur place, la sorcière s'empressa de fouiller dans son sac tandis qu'elle contournait l'obstacle pour le rejoindre. N'ayant pas l'objet de sa convoitise, elle possédait par contre une serviette en papier, qu'elle avait décidé de prendre pour s’essuyer les mains après avoir dévorer le gâteau, disposé dans une de ses poches. Tant pis ! Elle tendit le morceau tout en se raclant la gorge.

- Hum... Je n'ai que ça, mais ça fera l'affaire... Pardonnez-moi, c'est de ma faute si ce livre vous ai tombé dessus. Avoua-t-elle mal à l'aise.

Ouf, à présent ses terribles aveux ainsi que ses excuses présentés, le poids de la culpabilité s'en alla tout aussi vite. Mais voir le pauvre homme en train de se tenir le nez, la tête en avant, lui redonna de nouveau un peu de pitié; Il devait sûrement être très malchanceux celui-là...

[ Moi je connaissais huhu ]  

S'étant préparée à recevoir un soupire agacé, un froncement de sourcils, un reproche ou du moins l'expression d'un énervement de la part de l'homme qu'elle venait d'assommée, Lydia ne fut que très surprise -cela dit agréablement-, par la réaction de sa victime !
En effet ce-dernier, malgré le sang qui coulait pourtant de son nez, et le gêne qu'il pouvait peut-être ressentir à se tenir ainsi, dans un lieu publique, aussi ridiculement avec un mouchoir et la tête penchée, ne montra pas la moindre rancune. Au contraire, cela le désintéressait, voire le ... rassurait ?
Haussant les épaules, il lui confia que ce petit accident n'avait rien de grave, et qu'avant de savoir qu'il s'agissait de l'oeuvre d'une personne, il pensait que cela était dû à son pouvoir. Était-il alors habitué à ce genre d’événement ? Le pauvre... Et que pouvait-être sa magie ? Déplacement d'objet ? Téléportation ? Ou encore la matérialisation de ses pensées ?
La jeune femme fut davantage étonnée que lui, s'excusa. C'était pourtant elle qui venait de lui présenter un bouquin épais, et en plein dans le visage en plus ! Elle n'en revenait pas... Sa réaction était vraiment ... originale ?
La questionnant sur ce qu'elle cherchait, elle regarda la pile d’œuvres sélectionnées plus tôt et posée sur le premier support qu'elle avait trouvé -afin d'avoir les mains libres pour offrir de quoi nettoyer son nez à cet inconnu.

- Oui, justement, des livres sur comment contrôler son pouvoir ! C'était une coïncidence assez amusante, et en même temps cela la rassurait en quelque sorte de savoir qu'elle n'était pas seule. Bien sûr, elle s'en doutait déjà, mais, c'était bien la première fois qu'elle rencontrait quelqu'un qui avait l'air aussi préoccupé qu'elle, et embêté par ce manque de maîtrise de la magie.

Puisqu'il l'avait tutoyé, elle fit de même. Pourtant, à vu d’œil, il avait l'air plus vieux ! Mais bon, s'il avait abandonné le vouvoiement, elle le ferait aussi.

- J'ai sûrement dévaliser tous les bouquins traitant de ce sujet dans la bibliothèque, tu en veux peut-être ? Loin d'elle l'envie et l'intention de se moquer de son manque de contrôle, c'était au contraire dans un but innocent, de simplement l'aider à évoluer. Elle comprenait les désavantages que cela avait de ne pas pouvoir dompter une force pourtant propre à notre corps, alors se sentant plutôt concernée, il était pour elle normal qu'elle lui fasse cette proposition. De plus, Lydia lui avait tout de même éclaté le nez à coup de mots...

Sa serviette était à présent presque entièrement rougeâtre, le pauvre allait bientôt devoir en quémander une seconde. Fautive, Lydia espérait que ce saignement prenne vite fin, déjà pour que l'homme ait l'air moins ridicule... Et ensuite car ça ne devait pas vraiment être une position confortable, la tête en avant et la main devant la figure. Autour d'eux, des étudiants le regardaient, mais il n'avait pas l'air plus mal à l'aise que cela. D'ailleurs c'était justifié, ce n'était rien d’extraordinaire, ça arrivait mais il y avait tout de même un certain comique de situation. De son côté, la sorcière n'avait pas du tout envie de se moquer, elle était bien trop occupée à s'en vouloir.

Ayant proposé à l'adulte quelques livres, il accepta en espérant que cela lui permette d'avoir une boite de mouchoir. C'était amusant comme réponse, enfin, elle ne savait pas s'il avait dit cela dans le but de détendre l’atmosphère ou s'il possédait un réel sérieux derrière ses paroles. C'est vrai qu'il demeurait difficile de faire la part des choses. On se demandait facilement si ce personnage était un éternel triste malchanceux, ou s'il était assez habitué à ce genre de dégât pour en rire à présent. D'après lui, ces accidents étaient souvent liés à son pouvoir, mais bon, avec cette fois-là, Lydia ne pouvait pas s'empêcher de le percevoir comme un homme qui était souvent présent au mauvais endroit, et au mauvais moment.
Lui proposant de s'asseoir, elle accepta, et se plaça sur une chaise en face de lui puis posa sa pile sur la table choisie, où une autre personne était déjà installée. Cette-dernière lui refila gentiment un mouchoir qu'il échangea avec la serviette à présent inutilisable.
La demoiselle éparpilla un peu les bouquins sur le support pour que l'adulte puisse y choisir celui ou ceux pour lesquels il porterait le plus d'attention.
Soudainement, il lâcha son nom. C'était assez direct et inattendu, mais il allait bien falloir se présenter à un moment ou à un autre de toute façon. Détachant son regard des premières de couverture pour le poser dans celui du dit Answald, l'étudiante lui sourit.

- Enchantée, Lydia ! Répondit-elle sobrement.

Ce n'était pas une grande bavarde, ou en tout cas pas tout le temps. Elle attendant qu'il choisisse au moins un livre ou entame une vraie conversation pour pouvoir y prendre vraiment part.

Lydia remarqua que le saignement de sa victime avait enfin cessé. Tant mieux, elle pouvait à présent s'adresser à un homme plus qu'à un mouchoir. En effet jusque-là, le tissu blanc tâché de rouge prenait un trop large espace de son visage, qui l'empêchait de lire ses émotions, ou du moins quelques réactions, comme un sourire, ou encore une grimace. L'air captivé sur la collection de livre que la jeune fille avait disposé sur le table, Answald se décida à relever la tête, après avoir tout scruté, pour questionner la sorcière. Bien sûr, si elle avait choisi ces bouquins, c'est bien parce que tous lui semblaient intéressants. Assez embêtée par son pouvoir, aucune oeuvre n'était négligeable, il fallait tout lire, au risque de passer à côté de quelques informations importantes. Souriant à l'homme, Lydia répondit.

- Bien sûr, ils le sont tous !

Étrangement, même s'il n'y avait pas vraiment d'âge pour être timide, l'adulte semblait plutôt mal à l'aise, ou gêné. Pourtant, la demoiselle ne se sentait pas comme quelqu'un d'imposant, ou d'intimidant. Peut-être que le coup dans le nez l'avait rebuté ..? Enfin, il fallait passer à autre chose maintenant, la jeune femme avait tendance à beaucoup trop faire durer sa culpabilité.
Montrant un désir de ne pas déranger, il lui proposa, si parler ne l'emballait pas, de simplement lire chacun de leur côté. L'étudiante aimait bien bouquiner, certes, mais contribué à l'avancement d'une conversation ne la dérangeait pas non plus. De plus, l'homme semblait vraiment très gentil. D'ailleurs, il était en train de sourire. Décidément, ces suppositions se concrétisaient. Lui rendant chaque parcelle de bonne humeur, la jeune femme secoua la tête.

- Oh ne t'inquiète pas, tu ne me déranges pas du tout. Tu n'as qu'à me parler de toi, de ton pouvoir, de ce que tu fais. D'ailleurs, tu enseignes ? Demanda-t-elle au vu de ses années de plus.

Oops, lui demander de parler de lui n'était apparemment pas le meilleur sujet de discussion à aborder. En effet, l'homme n'eut pas l'air très emballé par cela. Aussi, il fit une bien courte réponse à ses questions, peut-être pour se débarrasser au plus vite de ce thème et en aborder un autre. La jeune femme fut surprise que malgré son âge il soit au sein de l'établissement en élève, mais elle savait tout de même que le contrôle d'un pouvoir n'avait pas d'année, et que cela dépendait de beaucoup de choses, ne serait-ce que le moment où une personne en apprend l'existence. Néanmoins, elle ne s'était pas entièrement trompée, en effet, il avait bien enseigné à une époque. En histoire de l'art et archéologie, la sorcière n'y connaissait rien, de ce fait, elle aurait pu apprécier qu'on en lui parle un peu. Mais le sujet dévia de nouveau sur son pouvoir qu'il peinait à maîtriser. Son attention était partagé entre les paroles et le contenu des livres. L'étudiante en pris un également qu'elle ouvrit et commença à parcourir des yeux, tout en restant assez attentive à Answald pour comprendre ce qu'il racontait.
La téléportation d'objet était son domaine, c'était un pouvoir intéressant ! D'ailleurs, cela correspondait parfaitement au genre de don que la demoiselle aurait préféré avoir mais qu'elle n'avait dont pas eu la chance de posséder. La vie aurait pu être tellement plus simple... Quoique. A en voir la difficulté qu'avait l'adulte pour le contrôler, elle se doutait bien qu'elle-même serait passée par là.
Le voyant replonger petit à petit dans sa lecture, Lydia en fit de même lorsqu'il la sortit brusquement pour lui demander son pouvoir. Lâchant un soupira, elle garda les yeux baissés.

- Une catastrophe. Dit-elle simplement. Si je suis encore là à présent, c'est seulement pour mon côté sorcière. Le reste est irrécupérable. Enfin... Elle tapota son bouquin du doigt. J'ai encore un peu d'espoir.

Elle finit par lui sourire mais ne s'aventura pas plus que cela sur le sujet, n'ayant même pas précisé ce qu'était sa magie.

La jeune fille avait remarqué que son manque de détails faisait se questionner Answald, réaction qu'elle comprenait. Aussi, lorsqu'il continua un peu sur la lancée, elle ne le repoussa pas. Était-ce pour autant une catastrophe ? Oui. Clairement pour elle, ce mot allait à merveille. Mais il y avait pire, certes, elle voulait bien l'admettre. Néanmoins, son pouvoir étant offensif, c'était davantage dans les moments de panique, de colère, dans ses besoins de se défendre ou ses envies de détruire qu'il arrivait. Se manifestait et ce de plus en plus violemment.
Alors oui, c'était pire qu'une défaite, pire qu'un boulet, pire qu'un danger. C'était une catastrophe.

- Disons que... Mon pouvoir est offensif. Alors il devient une réelle catastrophe dans les émotions plutôt négatives telles que la panique, la peur, le mépris, la colère. Lista-t-elle en songeant à son professeur de potion.

Par la suite, l'homme s’intéressa davantage à sa race, la sorcellerie étant un domaine qu'il ne connaissait que très peu. Il possédait une nature curieuse, et c'était tout à son honneur. Aussi, Lydia tenta de lui donner quelques explications, en se servant de ses expériences.

- Les sorciers ont la capacité de faire des potions, des incantations ainsi que de la localisation ! Commença-t-elle. J'ai déjà essayé plusieurs recettes pour affaiblir, et des sorts pour l'apprivoiser. Mais, il semblerait que ce soit plus compliqué... En fait, je pense que ça serait trop facile. Il suffirait donc d'être sorcier pour mettre fin à la magie avec l'histoire d'un seul sort ? Je ne sais pas, c'est trop invraisemblable. Je ne connais pas une telle magie. Je sais pourtant qu'il existe de quoi nuire à l'intégrité physique ou psychique d'une personne, mais tout ce que j'ai trouvé sur les dons, n'ont rien donné. Tout au plus, je pense qu'on peut les brider, mais seulement ceux de notre race. Non je ne sais pas. Peut-être que la magie d'une personne est plus inexplicable ? Peut-être que ça vient d'une sorte d'âme, d'autre chose en nous qui n'a rien en commun avec l'esprit ou le corps, mais qui a cependant réussi à s'intégrer à lui pour permettre à la chair et aux organes d'accepter une puissance, et au mental de la contrôler ?

La sorcellerie semblait être un sujet qui captivait Answald, soit, Lydia aimait bien parler de tout cela également. C'était un univers qui lui avait toujours plu, et dont elle en apprenait des nouveautés souvent. Une discussion se lança ainsi, conversation qui avait l'air d’intéresser aussi bien l'un que l'autre. Enchaînant, l'adulte commença à évoquer sa race, les mutants. Son point de vue aborder, la demoiselle rebondissait dessus, et développait sa vision des choses.

- C'est peut-être comme une sorte de virus ? Selon le corps il prendrait plus ou moins de temps à se développer. Un virus héréditaire et qui a commencé à se transmettre de façon non naturelle, comme par le biais d'expériences. Vous êtes peut-être le fruit d'un homme ou d'une femme qui un jour a voulu tester des produits sur un humain. Il ou elle aurait réussi ce projet et ainsi créé une nouvelle race qui s'est développée par la reproduction, en admettant qu'il ait eu plusieurs cobayes à la fois. Ou alors vous êtes des ratés... Mais un pouvoir est tellement quelque chose de beau que je n'envisage pas ça.

Le sujet des mutants traités, il décida de revenir sur celui des sorciers. Exposant une sorte de déséquilibre de puissance entre les deux races.

- Les sorciers, c'est différent. On va dire que ça existe depuis toujours, et que ça a provoqué des meurtres et des superstitions. Nous, nous sommes peut-être d'origine "naturelle", entre autre, tandis que vous, comme je le disais, celui d'une expérience. Je n'ai pas envie d'énoncer une supériorité des sorciers face aux mutants, certes, on a quelques capacités en plus, mais ça se travaille durement. Puis, je ne pense pas que voir un sorcier se prendre une raclée par un mutant soit quelque chose de rare... Ce n'est pas une compétition. Oui, je pense que pour vous comme pour nous, c'est lié aux émotions, on aura plus de mal à contrôler un pouvoir si l'état mental ne s'y porte pas. Par exemple dans un lâché prise comme la colère, la tristesse, ou la peur, car dans ce genre d'émotions, on a tendance à vouloir se protéger de quelque chose. Il y a une idée d'instinct derrière.

Voyant dans quel genre de débat long et à perte de vue ils s'était engagés, Lydia sourit. Le mutant s'était instantanément calmé lorsqu'il commença à parler de son problème, disant ensuite qu'il s'emportait trop. La sorcière voulut le rassurer.

- Difficile de ne pas s'emporter avec un tel sujet !