La blonde s’en voulut encore plus quand elle entendit qu’il avait l’habitude d’être victime de ce genre de comportement en ce moment. Ca n’était pas la meilleure période pour de nombreuses personnes apparemment. Et il fallait que sa propre période tombe en même temps que celle de Théophile qu’elle aurait pu réconforter à sa manière. Elle renifla en même temps que la pensée qu’elle était immature lui montait à l’esprit. C’était elle la plus vieille. Encore une fois. C’était le cas pour beaucoup de son entourage à l’institut. Et pourtant, à part faire sa gamine et pleurer, en ce moment, déjà qu’elle n’excellait pas dans l’art d’être mature de base, ça n’arrangeait rien. Le plus mature à ce moment-là était encore l’autre. Pas Morgane. Elle s’était souvent félicité de ne guère se tromper sur les personnes qu’elle considérait comme des amis. Mais elle ne s’était jamais douté qu’ils avaient tous une certaine maturité qu’elle leur enviait beaucoup. Maturité dont fit preuve Théo en parlant d’excuses pour le comportement précédent de la mutante. Oui et non. Des raisons, il y en avait, mais pas pour autant justifiables pour s’emporter sur lui. Théophile était incroyablement brave, faisant réfléchir Morgane sur son siège.

Elle eut envie de lui dire oui pour la porte. De reprendre ce petit contact avec lui. Mais il sembla trouver une autre solution. Elle vit ce geste s’effacer, cette main tendue pour revenir dans un endroit plus adéquate, mais qui disparut. Tête relevée, elle la rebaissa, se sentant idiote de rester là… Mais aussi se sentant idiote d’être aussi lunatique, de retourner normalement auprès de lui après tout ça.

Les paroles de la chanson de la petite sirène firent machinalement sourire l’ainée, qui sursauta bientôt devant des poissons apparaissant soudainement. Se sentant comme Ariel dans le clip, elle ne put s’empêcher de rire doucement, suivant calmement des yeux la danse des poissons, se surprenant même à chantonner à son tour. Elle rigola un peu plus fort quand Théo sortit de la chanson. N’ayant plus que des traces des défuntes larmes sur son visage, elle se racla la gorge.

« J’suis pas dans la baignoire, j’suis sur les toilettes… » dit-elle avec un fin sourire restant accroché sur son visage. En s’entendant et se rendant compte de la situation, elle continua son précédent rire. « Tu sais, comme le cliché de la meuf qui pleure toutes les larmes de son corps sur le chiotte. Encore ça va que j’me maquille pas et que j’ai pas de mascara qu’à coulé… » dit-elle en se moquant d’elle. « Et j’sais pas si j’arriverai à me noyer là d’dans… Ni même si j’aurai envie d’essayer en fait. » finit-elle par dire, se coupant elle-même avec quelques bribes de rires qu’apportait sa bêtise.

Le rire de Morgane se poursuivit avec les paroles de Théo. Sacré gosse. Diminuant le volume de son rire quand elle entendit du bruit, elle crut que le garçon allait rentrer, mais non. Partait-il ? A croire que son inquiétude fut ressentie, ou bien était-ce le hasard, mais l’oiseau expliqua rapidement la suite de son programme, faisant sourire la blondinette sur ses toilettes. Puis la faisant à nouveau rigoler.

« Range-les bien, avec Dame Nature je risque de te péter la gueule pour si peu… » dit-elle avec une voix amusée. Ouais, Dame Nature servait à beaucoup de choses. Sauf pour les maux de ventre. Désireuse de ne pas trop fréquenter ces futures douleurs, elle chercha des yeux son médicament mais ne le trouva nulle part. Zut. Il était sûrement dans sa table de chevet. Son soupir se lança en même temps qu’une nouvelle chanson de la part de son nouveau colocataire.

« Oh non, pitié, pas ça… » murmura-t-elle à son attention à voix basse. Elle détestait ce disney. La voix de ce Disney aussi. La chanson. Tout. Même si la voix du sorcier était agréable, il avait certainement trouvé le point faible Disney aux yeux de la mutante.

S’occupant de l’arrivée de Dame Nature, Morgane finit par sortir de la salle de bain, voulant se faire discrète. Mais la porte ne l’entendit pas de cet avis là et grinça, figeant la fine silhouette avec son verre dans la main.

« Pitié, pas de chanson d’amour. S’il te plait. Pas de Blanche-Neige ni de Bambi ou de la Belle et la Bête. » demanda-t-elle avant de rire faussement, gênée d’interrompre Théo. Mais cette chanson lui hérissait le poil. Ses mains firent rappliquer la totalité de sa chevelure devant son épaule avant de s’en aller vers sa table de nuit. Ou plutôt, son ancienne et donc celle de Théo, se rapprochant de lui. Elle n’avait squatté que le lit de William pour l’instant, laissant encore quelques affaires vers son ancien côté. Sa main libre ouvrit le tiroir et prit son cachet, l’accompagnant d’une minuscule gorgée d’eau avant de poser le verre sur la table de nuit.

« J’ai encore… Des affaires à moi de ce côté. Désolée. Je fais vite. »

Encombrant ses bras avec le plus de bêtises présentes dans son ancien tiroir, Morgan sourit doucement face aux paroles rassurantes de Théophile. Elle ne le voyait pas désordonné. Comme quoi. Elle se releva et se rapprocha de la table de nuit de Willliam, mélangeant leurs affaires, ne se sentant toujours pas prête pour les enlever. Un soupir silencieux s’échappa à leur vue, mais la tristesse qu’apporta le visuel fut bien vite balayée par la voix de Théophile et par la chanson sélectionnée. Morgane en aimait bien la chanteuse, même si elle trouvait qu’elle faisait un peu trop de chansons mélancoliques à son gout. Chantant les paroles intérieurement en même temps que le brun, elle fit un second et dernier aller-retour pour s’emparer de ses dernières bêtises de la table de nuit.

Les deux continuèrent ainsi leur rangement jusqu’à ce que le garçon termine le premier. Elle l’observa quelques secondes avant de lâcher un léger merci face à son attention. La blonde pressa le pas pour récuperer ses dernieres propriétés sur le désormais territoire de Théophile, mélangeant là encore ses propres affaires avec celles de William. Il n’y aurait bientôt plus son odeur sur ses affaires. Et pourtant. Elle trouva qu’elle en aurait encore besoin durant un long moment. Une chance de ne pas avoir les affaires de Krysten. En plus d’avoir des gouts très simples et vieux, ils étaient recouverts de poils de ses bêtes. C’est sûr qu’elle n’allait pas les porter, ses affaires à lui.

Ses pensées visant son cousin, le regard brillnt de Morgane se posa sur Théophile qui demanda pour ses chères règles ainsi que pour une suite de chanson, ajoutant un style de musique à son répertoire.

« Dame Nature ne me laissera jamais tranquille. En tout cas, jusqu’à la ménopause. »

Ok, ça, c’était triste, c’était la première fois qu’elle se dit ça. Ce n’était pas pour lancer Théophile sur un répertoire interminable et pour l’entendre chanter jusqu’à la fin de ses jours. Non, loin de là. Mais cette pensée la fit se figer sur cette vieillesse qui se rapprochait. Dans 10 ans ? 20 années grand maximum ? Elle ne voulait pas vieillir. Mais il fallait se le dire, la Morgane d’il y a 5 ans et celle d’aujourd’hui étaient différentes par l’apparition d’une certaine maturité dans ses traits. Quoi dire alors de ce corps masculin qu’elle avait il y a de cela une bonne demie heure voire plus. S’il avait gardé une apparence de frêle garçon jusqu’à ses 20 ans passées… Elle savait sa machoire plus carrée et son regard bien moins jeune.

Morgane se secoua la tête légèrement pour dégager ses pensées de vieillesse et de changement.

« Je vais encore pleurer si tu me chantes des berceuses. Et sinon c’est comme tu veux… Bon. J’ai fini. Je crois. Si tu trouves encore des affaires qui ne t’appartiennent pas, préviens-moi et je les récupère. » dit-elle en faisnt intérieurement référence aux biens de son meilleur ami. Puis une idée bête. Tellement bête mais qui lui ferai tellement de bien. Ou qui continuerait à la plongée dans une certaine mélancholie. Les deux possibilités étaient possibles.

« Dis-moi Théo… Tu saurais… Encrer une odeur définitivement sur un objet ? Enfin, pas définitivement… » Il fallait bien passer à autre chose. Mais pas maintenant. « Juste… Quelques mois ? »

Peut-être qu’au final, Morgane s’attendait à un non. Peut-être le voulait-elle en fait. Voir sa demande être refusée, être impossible. Devant le début des recherches de Théophile dans son livre, Morgane crut défaillir. Elle pouvait réellement garder l’odeur de William sur ses effets personnels. Elle pourrait réellement remplacer sa présence par l’odeur de son fantôme. Au fond, elle commençait à se demandait si elle allait réellement surmonter sa disparition, aidée ou enfoncée par son odorat qui ne cesserait de le lui rappeler. Elle ouvrit la bouche quand il parla d’essai, sentant une boule dans son bas ventre. Toujours là. Toujours un peu plus forte. Elle savait qu’elle ne pourrait pas rester éternellement comme ça, dans cet état, dans cette attente.

« Je… » commença-t-elle, ayant du mal à parler avec cette gêne dans sa gorge, lui donnant l’impression… Ou plutôt l’alarme qu’elle allait repartir en pleurs. Essayant de les maintenir, elle réussit à terminer sa phrase. « Laisse tomber. »

Les pleurs recommencèrent, faisant paniquer la petite blonde. Elle détestait vraiment ça. D’un pas précipité, elle fonça dans sa nouvelle armoire et s’empara d’une veste de son ancien colocataire, lui allant bien trop grand. Comme ses propres vêtements masculins.

« J’suis désolée mais ça va pas être vivable pour nous deux là. Je… » L’enfilant et s’essuyant les joues avec les manches, elle continua de s’emparer de plusieurs objets personnels qu’elle plongea dans son sac noir. « Je retourne quelques temps chez mes parents, ils habitent pas loin et… ça me fera du bien. » dit-elle en fermant sa fermeture éclaire, prenant le sac sur son dos. « C’pas d’ta faute, rassure-toi. J’risque de faire quelques allers-retours dans la chambre mais tu seras tranquille les soirs pour t’habituer à ta nouvelle chambre… »

Sa main attrapa son propre trousseau de clef, pour ensuite se diriger vers la porte, s’emparant de la poignée de la porte. La blonde se retourna quelques secondes, affichant un sourire humide.

« Merci pour tes chansons et tes efforts. Et … désolée pour… ça. Quand ça ira mieux, j’te promet des moments plus sympas. Fais toi plaisir avec mes jeux vidéos, mais juste fais attention à pas écraser mes sauvegardes… »

C’est sur ses derniers mots que Morgane prit la fuite de cette chambre, ayant l’impression de faire de trop nombreux pas en arrière en retournant chez ses parents. Mais quand rien ne va, même à 28 ans, elle ne voyait pas d’autres solutions. Un peu de repos. Se reposer. Loin de tout.