Ca y est, c’était le grand jour. Sa grosse valise était déjà prête depuis plusieurs jours déjà. Pas que Nick s’impatientait. Mais être enfermé dans cette chambre qui lui était totalement inconnue suite à son accident et à sa perte de mémoire était assez troublant. Il ne savait pas comment il avait atterri là, y habitant apparemment depuis seulement quelques semaines, ayant donné très peu d’informations sur lui à cet institut. Il savait juste que par sa nature de mutant, une nature qu’il n’avait pas oublié, il était « à la bonne place » mais… Pas chez lui. Encore moins avec ce petit gringalet qui partageait sa chambre. Enfin. Petit gringalet. C’était comment il se le nommait mais apparemment, ce Alec était plus vieux que lui. C’en était presque absurde.

Un soupir s’échappa. Il allait partir d’ici. Avoir un tuteur. Une tutrice même. C’était bizarre. Il n’en ressentait pas le besoin. Tout ce qu’il voulait, c’était retrouver des repères, et il n’en avait aucun ici. Tout comme il n’en aurait pas là-bas mais au moins, il se souviendrait de son arrivée là-bas. Il y aurait un certain équilibre avec ce nouveau départ. Ces derniers temps depuis sa perte de mémoire, on le disait instable par rapport à avant. Sans le vouloir, sa mutation faisait n’importe quoi. Ou bien était-ce lui qui faisait n’importe quoi avec ? Dans les deux cas, faire exploser des objets à proximité d’autres personnes n’était pas quelque chose de justifié ni de bien vue. On le regardait bizarrement, comme quelqu’un de dangereux et d’impulsif. A la fin, ce fut un professeur, cette Chelsey, qui parla de lui trouver quelqu’un pour s’occuper de lui. Il n’avait pas vraiment eu son mot à dire. Les autres, les professeurs, savaient mieux que lui ce qui était bon dans son intérêt… Et dans le leur.

Le regard de Nick s’attardait sur son iphone. Sur l’heure qu’il présentait. C’était loin d’être l’heure mais tant pis. Il finit par se lever, laissant la valise dans sa chambre. Il voulait trainer en ville avant la fameuse rencontre avec cette Knight. Pas besoin de s’encombrer de ça. C’est d’une démarche tendue qu’il arpentait les rues de Jacksonville, mains dans les poches, celles qui contrôlaient son pouvoir. Du moment qu’il les gardait enfouies, tout devrait bien se passer. Mais chassez le naturel et il reviendra au galop. Il avait une certaine impulsivité dans son comportement. Comme si ce sentiment de non sûreté, d’insécurité ne faisait pas parti de lui. A la moindre jolie femme ou bel homme, il redressait les épaules et le torse tel un pigeon roucoulant devant une consoeur, avec une certaine fierté, avec un certain dédain. Il avait 16ans -de ce qu’il avait dit- mais pourtant son regard se portait sur des personnes bien plus mûres que les adolescents. Il avait une certaine maturité dans ses gouts, partant parfois jusqu’à des personnes se rapprochant des 40ans. C’était ouf ces gouts. Il ne sentait pas cette étrange attirance anormale. Il y était habitué même s’il trouvait ça malsain pour quelqu’un de son âge.

« Perd…Pardon. »

A force de trop observer la gente masculine et féminine, il avait fini par rentrer dans l’un d’eux. L’une d’elle-même. Une simple bousculade mais assez franche au niveau de l’épaule des deux. Son regard se baissa sur son visage. Plutôt mignonne. Jeune. Bon, pas autant que lui, certes, mais jeune par rapport à la tranche d’âge sur laquelle il buguait d’habitude. Un sourire ne put s’empêcher de naître. Elle est plus que mignonne bon sang. Ok, hormones en ébullition.

« Pas trop de mal ? » enchaina-t-il aussitôt après avoir étirer ses lèvres.

Qué que quoi ? Non mais celle-là était complètement parano celle-là ! Bon, pas complètement, parce que Nick lui aurait bien proposer d’aller boire un verre afin de se faire pardonner mais…Il n’avait encore rien fait ! A part sourire. Oui, bon, on lui avait déjà dit que son sourire faisait très facilement aguicheur. Enfin, plutôt… Il avait l’impression qu’n le lui avait dit des centaines de fois. Mais bon sang. Il avait dû tomber sur une de ces féministes totalement hystériques et abusives. Ah, ça, pour calmer ses ardeurs, elle les lui calma bien, lui faisant perdre aussitôt son sourire. « Draguer quelqu’un de son âge. ». « Fan de twilight ». Sérieusement ? Et puis c’était quoi ça Twilight ? Elle en pouvait pas parler normalement sans user de références étranges ?

Le visage de Nick s’obscurcit rapidement. Monde de merde. C’était fou, il quittait une chambre totalement inconnue qui lui filait le bourdon pour prendre l’air, et dès le moindre instant ou il ne faisait pas attention il fonçait dans une furie ? Un bon karma, ça lui était déjà arrivé dans ses 16 années de vie au moins ? Il recula d’un bon pas pour l’observer de haut en bas, avant de retourner son regard sur elle, haussant un sourcil.

« Mais c’est quoi votre souci là en fait ?»

Non mais il rêvait ou elle était déjà sur son téléphone mode cause toujours tu m’intéresses ? Elle se plaignait d’un jeune qui draguait -alors qu’il n’avait même pas commencé !- et elle-même réagissait comme une adolescente en s’enfermant sur son téléphone ?

« Je bouscule, je m’excuse et ça justifie votre comportement ? Ah, ça doit être le sourire, excusez-moi, la prochaine fois je pleurerai. » rajouta-t-il, sortant ses mains de ses poches pour effectuer divers gestes de mécontentement avant de les sentir picoter. Merde. Pas le bon moment, pas le bon endroit. Il détestait fuir, mais il le fallait. La panique le prenait, lui faisant lancer des gestes inquiets et fébriles autour de lui. Marre de ce pouvoir. Marre de devoir garder ses mains dans les poches constamment fermées. Ni une ni deux, sans prévenir, Nick fit demi-tour sur lui-même et reprit la direction de l’institut d’un pas pressé, doublant négligemment tous les autres, cette fois sans s’excuser en cas de contact. Il fermait les yeux la plupart du temps, pour se plonger un peu dans le noir, essayant d’y trouver un certain repos. Mais à croire qu’aujourd’hui, tout était impossible. Pour cause, des scènes de son précédent accident de moto lui prirent le cœur, faisant fulminer un peu plus ses mains qui pourtant restaient fermement implacables, les ongles plantées dans ses paumes.

Ca passait enfin. Il avait évité le pire. Il était de retour dans sa chambre, volets fermés, lumière éteinte. De l’obscurité. Sans que son imagination ne puisse lui jouer de tours, gardant bien ouvertes ses paupières qui observaient l’ampoule éteinte du plafond. Sa respiration était à nouveau calme. Il n’avait rien fait exploser. Tout allait bien. Si ce n’était que son précédent stresse revenait. Son regard alors porté sur son téléphone qu’il prit sans sûreté dans son geste. Et c’est après un malheureuse tentative pour rattraper son téléphone chutant que celui-ci explosa au lieu de se figer. Ok, pour l’heure du rendez-vous, ça allait être compliqué…

Bon, ça n’était jamais que le second téléphone après tout…Il n’y avait rien sur celui-ci. A part un égo surdimensionné qui avait voulu s’acheter le dernier modèle d’Apple. Il y avait une somme astronomique dans son porte-monnaie, autant en profiter. Même si ce ne fut que l’instant de quelques jours ou le pauvre téléphone ne servit qu’à regarder les heures passer. Cependant, le téléphone provenant de son ancienne vie, lui, renfermait certainement beaucoup d’éléments de son passé. Il l’avait gardé bien précieusement en attendant de trouver un sorcier qui pourrait le lui réparer. Il était dans un institut remplit de mutants et de sorciers, autant en profiter.

Nick resta de nombreuses minutes à plat ventre sur son lit, la tête dans le vide fixant les morceaux de verre et de plastiques en morceau, le regard vide. Cette impression de perte de contrôle ne lui plaisait pas. Il n’y était pas habitué. Il savait qu’il n’y était pas habitué. En plus de ce que l’on disait de lui, ces deux semaines précédant son accident furent tranquilles. Il s’était montré comme un garçon mature et secret, maniant très bien son pouvoir, trop bien pour quelqu’un de son âge. Alors pourquoi désormais, tout partait dans tous les sens ? On avait dit de lui qu’il était un garçon assez hautain et sûr de lui. Certes, il sentait un égo assez élevé chez lui, ainsi qu’une certaine fierté de lui. Mais il percevait aussi un manque de confiance chez lui. C’était étrange. Entre ce qu’on disait de lui et ce qu’il ressentait… Il avait l’impression d’être 2 personnes distinctes.

Une demie heure passa durant laquelle le garçon s’assoupit ainsi, tête dans le vide. Ce fut un claquement de porte dans le couloir qui le fit sursauter.

« Merde, merde, meeeeeeeeeeeeeeeerde… » s’empressa-t-il de dire avant de se lever en trombe. Il aurait pu partir directement avec sa valise et fuir cette chambre mais… Il y avait encore ces fichus éclats par terre. Et il avait beau s’en foutre de cet institut qui semblait le virer chez une femme, il respectait un minimum son futur ancien colocataire, Alex, ou un truc du genre. Sauf que sans balayette… C’était compliqué. Prudemment, il se servit de sa main gauche comme pelle et de la droite comme balai pour y pousser les morceaux dans le creux. Sans surprise, il se coupa. Jetant la poussière de verre dans la poubelle de la salle de bain, il se rinça rapidement le doigt avant de le mettre en bouche et d’en suçotter gaminement le sang. Aller. Partir. Sa main saine s’empara de la poignée de sa valise et quitta cette chambre sans regret. Descendant les étages, il put s’apercevoir de l’heure. Un quart d’heure de retard. Oups.

« Désolé, j’avais pas vu l'heu… » commença-t-il à s’annoncer, arrivant dans le hall. Mais sa voix se tût. Tout comme son corps qui se figea, sa valise lui cognant l’arrière des jambes. La fille de tout à l’heure. C’était une élève elle-aussi ? Sérieusement, ça lui arrivait aujourd’hui ? Devoir encore être en sa compagnie en attendant sa tutrice ?

Son regard digne du plus puissant des congélateurs se posa sur un dossier sur ses jambes. Un dossier identique au sien. Le même. Certainement avec autre chose à l’intérieur. Comme des informations sur lui. Tout comme dans son propre dossier, il avait eu des informations sur sa future tutrice… Dont il s’était éperdument fichu. L’institut ne voulait de lui comme pensionnaire, alors pourquoi se renseigner sur sa future tutrice alors que c’était irrévocable ?

« C’est vous ma tutrice ?! » s’emporta-t-il aussitôt avec un accent espagnol ressortant remarquablement par l’agacement.

« C’est mort ! »

Ses mains relâchèrent la valise, cherchant son téléphone pour appeler Chelsey et annuler toute cette mascarade ou en tout cas, annuler le lien entre cette femme et lui. Sauf qu’il ne le trouva pas. Ah oui. C’est vrai. Machinalement, il mit son index à sa bouche nerveusement.

« Je vous laisse appeler Madame Wildmore, j’ai pas de téléphone. Si elle veut me parler, elle me trouvera dans MA chambre. »

Ni une ni deux, avec sa valise, il fit demi tour pour mettre en action ses dires.

Et dire qu’il pensait avoir la paix. Elle aurait pu avoir la décence de le laisser partir et de simplement envoyer un sms à Chelsey. Mais non. Il entendit ses pas le suivre. Il détestait ça, se sentit épié, suivi. De plus en plus sur ses gardes, il gardait la poignée de sa valise fermement dans sa main faisant attention à ne pas bouger un seul petit doigt. Vu son état, juste cela pourrait entrainer facilement une explosion et même certainement celle de sa valise. Autant éviter, c’était là-dedans qu’était compressé tout son passé, se résumant à des vêtements, quelques babioles et les photos d’un couple ou d’une famille. Leurs sourires étaient radieux, un homme avec 4 enfants avec en fond un parc d’attraction. Mais lui, ne s’y trouvait pas, à part dans plusieurs de leurs traits.

Ses grandes jambes lui permirent de semer assez facilement l’intruse dans son cocon, montant les escaliers quatre à quatre, faisant décoller sa valise de ses roulettes le temps de gravir les marches. Mais sous l’énervement, son souffle ralentit sa course, sûrement à cause du poids nouveau de la valise aussi. Dans tous les cas, la jeune femme parvint à le rattraper après lui avoir lancé… Un ordre ? Une demande ? Quoi qu’il en soit, ce ne fut que lorsqu’elle le dépassa et lui bloqua le passage que Nick se figea en plein milieu de l’escalier. La toisant d’un regard froid, l’un de ses pieds recula d’une marche pour retrouver un certain équilibre. Il ne lâcha pas pour autant sa valise, ne cillant pas une seule fois, ni devant ses excuses, ni devant le profil qu’elle imprimait d’elle. Mais ces 30 minutes quémandées pour plaider sa cause attira une certaine réaction chez l’adolescent. Vraiment ? Il pouvait choisir ? Son regard se baissa quelques secondes, faisant le pour et le contre avant de voir la silhouette finalement descendre. Tournant sur lui-même pour ne pas lui tourner le dos, il suivit son mouvement. Finalement elle avait renoncé ? Pensant cela, Nick gravit les dernières marches de l’escalier mais se stoppa à nouveau voyant la femme s’asseoir. A quoi elle jouait ? Il resta plusieurs secondes à l’observer d’un regard toujours aussi peu amical mais un minimum interloqué par tout ça. Un regard qui le devint entièrement tout compte fait devant ses paroles.

Des paroles absurdes, mais qui traduisaient pourtant une crainte chez celle qui devait être sa tutrice. Comme une sorte de stress face à l’arrivée de quelqu’un, comme si elle voulait faire bien, désireuse d’accueillir mais quelque peu perdu par cette intrusion. Il avait l’impression d’avoir déjà connu ce stress-là. Celui d’accueillir quelqu’un et de préparer tout une chambre pour que la future personne s’y sente à l’aise. Une odeur imaginaire vint illustrer ce souvenir qui eut un effet apaisant sur son corps crispé qui se détendit un peu. Gardant son menton enfoncé dans sa veste, la fermeture éclair capturée par sa langue, il s’amusait à faire tinter le métal contre ses dents sous l’hésitation. Son regard se posa une dernière fois sur sa valise avant de la laisser à l’étage et de descendre les escaliers doucement, mains toujours crispées dans les poches.  S’installant contre la rambarde pour être le plus éloigné possible de cette femme, deux escaliers plus haut, il ramena ses jambes contre son torse.

« Je ne savais même pas que vous étiez militaire. Enfin, si, avec vos plaques… Mais je n’ai pas lu votre dossier. Ça ne sert à rien. » décrocha-t-il sans beaucoup de tact. A ses yeux, lire des informations sur un bout de papier ne lui servirait à rien à part formuler dans son imagination un profil bien défini, qui pouvait tout autant être erroné au final. Et l’impression d’être de trop dans cet institut ne faisait que le pousser à partir chez la première personne venue… Sauf quand celle-ci venait quasiment de l’agresser juste par des paroles il y a de cela une heure peut-être. Mais c’était passé. Ce n’était qu’un simple coup porté à l’égo d’un adolescent aux hormones frivoles après tout.

Peut-être sa phrase pouvait-elle être vue comme une provocation. Ça n’était pas l’envie de Nick, mais si elle passait comme telle, il s’en ficherait bien. Il n’allait pas changer pour un sous pour ses beaux yeux. De beaux yeux inaccessible car appartenant à sa responsable légale. Ça craignait. Il avait failli inviter à prendre un verre avec la tutrice. Peut-être en aurait-il rigolé un jour, mais aujourd’hui, c’était raté. En parlant d’autres trucs étranges, la dénommée Arthémis accueillit la réponse de Nick positivement, comme si le dossier n’était pas flatteur pour elle. Ses pensées allèrent finalement sur ces feuilles, encrées par une soudaine curiosité. Une curiosité bien vite dégagée par la suite des paroles de la militaire. Du coin de l’œil, il la sentit se tourner vers lui mais préféra garder ses yeux rivés sur le bas des escaliers.

« Je n’en ai pas la moindre idée. » répondit-il dans un soupir, juste avant qu’elle ne poursuive. Elle aussi semblait avoir une assez forte curiosité, bien que non rassasiée par de simples mots décrits par une personne ne connaissant nullement Nick. Les mots étaient sûrement tournés autour de son self-control inexistant et sur son attitude agressive ces dernières semaines. Il pouvait aussi aisément deviner la présence de l’épisode du crash en moto. Heureusement pour lui -et pour elle aussi d’un côté-, les informations qu’elle souhaitait entendre de vive-voix pouvaient attendre un peu avant de sortir. Le brun aurait pu lui en être reconnaissant mais son humeur n’était pas aussi bonne. De toute manière, Arthémis n’avait pas attiré l’attention du garçon. Pas encore, du moins jusqu’à ce qu’un écran lumineux soit déposé à ses pieds, avec une légende bientôt ajoutée. Laissant l’appareil quelques secondes immobiles, il finit par légèrement se pencher pour s’en emparer et faire défiler négligemment les photos avant de tomber sur le visage de la jeune femme. Il ne put s’empêcher de sourire face à la présence de couleur sur son visage. Ça la changeait. La tenue qu’elle arborait aujourd’hui était bien trop triste pour faire ressortir des allures de femme vivante qu’elle avait sur ces clichés.

« L’inquiétude je pense. » balança avec un certain automatisme l’élève avant de rendre le téléphone et de récupérer un visage aussi neutre qu’avant. Peut-être avec moins de froideur que précédemment. Cette inquiétude, il l’avait bien senti aussi. A vrai dire, il la ressentait encore. Mais pas à l’égard de la situation, plutôt à l’égard de sa vie actuelle et de son existence sur cette planète.

Son corps sursauta légèrement suite à un bruit sec venant de son dossier. Sorti de ses pensées, son regard finit par se porter sur la silhouette de la militaire s’éloignant sous une surprise qu’il ne put dissimuler par ses grands yeux ouverts. Il n’aurait pas pu deviner ses gestes à vrai dire et la remercia intérieurement. Voir ce dossier dans sa -peut-être- future maison aurait tenté ses doigts, et lire tout ça ne lui aurait certainement pas plu. Il la raccompagna du regard jusqu’à ce qu’elle retrouve sa place d’antan, sans chercher à le rejoindre sur sa marche. Elle gardait ses distances. Il était étonnant de voir qu’elle ne cherchait pas à le bousculer plus que ça. Et ce fut apprécié. Bon, elle perdit des points avec son histoire de famille, bien qu’elle y ajoutât de l’humour qui ne l’atteignit pas vraiment. Il se retint de répondre. Il ne voulait pas de cette famille. Il ne voulait pas de famille en fait. Ou en tout cas, une qui n’était pas la sienne. Etrangement, il ne ressentait pas l’envie d’un adulte à ses côtés. Ni père, ni mère. Non, Nick avait juste envie d’offrir de la bienveillance et un esprit paternel et protecteur à une personne. Quoi que, un chien aussi, ça serait bien.

« Ton prénom était écrit en gros sur le dossier. Aucun souci de prononciation pour moi, je parle plusieurs langues. Sinon j’aime beaucoup les bêtes. Du moment qu’elles restent à leur place et que je ne trouve pas de poils dans mon lit. Je crois. Pourquoi ? Tu as un chien ? » demanda-t-il enfin avec un certain intérêt depuis le début de leur retrouvailles à l’institut, avant que son attention soit finalement reporté sur un groupes de 4 élèves entrant dans les escaliers. Nick se raidissant légèrement face à cette intrusion et les observa, étant tout autant observé du coin de l'oeil. La conversation des deux groupes s'était tûe. C'était des visages familiers, tout autant familier que chacun des personnes le fuyant comme la peste. Mal à l'aise, Nick attendit qu'ils disparaissent, sa machoire et ses poings se contractant et retrouvant finalement ses poches comme protection.

« On peut partir d'ici s'il te plait ? »

Une réponse silencieuse suivit sa demande. Sans attendre ou en demander plus, Nick se leva et descendit les escaliers après avoir récupéré sa valise un peu plus haut. Le silence, c’était bien, l’espagnol aimait beaucoup le silence. Sauf lorsqu’il était présent entre lui et une autre personne. Rajoutant à cela le fait qu’auparavant la conversation avait enfin été amorcée avec beaucoup de difficultés…Désormais, il était compliqué de la relancer. A vrai dire, il ne savait même plus s’il avait envie, s’apercevant soudainement de ses précédemment mots et des gestes qui les suivaient. Il avait accepté la tutelle. Dans la seule envie de ne plus croiser ce groupe d’élèves ressemblant tellement aux autres. Pour fuir cet endroit. En vérité, il ne savait pas si c’était une décision précipitée à cause de l’ambiance ou bien s’il avait déjà pris sa décision inconsciemment, bien avant l’incident.

La main sérieusement serrée sur la poignée de ses biens, il grattait sous l’anxiété la fine croute de sang qui s’était formée sur son index en même temps que ses pas le rapprochaient de la sortie de l’établissement. Il aurait pu se sentir bien à l’idée de quitter l’école, mais ce n’était au final qu’une chambre qu’il quittait, devant revenir pour les cours. Le cauchemar n’était pas fini après tout. Mais peut-être les tensions allaient s’apaiser au fur et à mesure, en se sentant moins prisonnier d’une chambre dans laquelle il ne se souvenait plus de son atterrissage. Au moins, avec Arthémis, il aurait le droit à un nouveau départ dont il se souviendrait mais surtout à une personne le connaissant (son prénom du moins) et l’accueillant. Son regard se porta sur celle-ci à cette pensée, se demandant si le caractère de la jeune femme allait changer suite à son emménagement. Il était normal d’être sympa avec quelqu’un au début. Puis les mauvaises habitudes caractérielles pouvaient bien rapidement reprendre le dessus. Tout comme son caractère pouvait changer, confronté à celui de Nick. Leurs regards se croisèrent quelques secondes avant qu’il ne mette fin à ça, la militaire entama en contrepartie un échange vocal. Un retour à la discussion. Vu le brouillard présent dans son cerveau désormais face à toutes les interrogations qu’il se posait, il ne savait plus vraiment si continuer à parler serait une bonne idée. Au final, ça le fut, surprenant Nick qui reposa aussitôt son regard clair sur la fameuse werewolf.

En fait, il ne savait pas ce que c’était de base, mais ce qui suivit devait être l’explication de la race ? Quoi qu’il en fût, elle venait de récupérer son attention et sa curiosité. Il est vrai que ses lèvres s’étirèrent légèrement quant à sa blague.

« Si c’est instinctif, tu es sûr de résister à des draps remplis d’hormones de jeune mâle ? » posa-t-il dans un second degré qui n’était détectable qu’à son sourire, sa voix étant toujours aussi calme, n’ayant pas changé d’une octave. Légèrement en retrait par rapport à sa tutrice, il lançait de temps à autre des regards vers la jeune femme pour deviner sa direction, ne sachant pas vraiment la destination de son futur foyer.

Un court éclat de rire sortit de la bouche de Nick quand son front fut déjà puni par Arthémis. Ça commençait bien. Il se faisait déjà martyriser. Il se frotta doucement le front par la suite, comme pour effacer son geste ou le léger picotement qui se faisait à peine sentir. Son sourire s’agrandit à la suite de sa blague.

« Je me sens déjà comme un vieux loup pourtant… » répondit aussitôt Nick, faisant référence à sa manière de pensée qui s’éloignait de celles des autres jeunes mais aussi à ses douleurs dignes d’un vieil homme déjà. Après sa remarque ressemblant peut-être trop à la suite de leur blague, le reste du trajet fut silencieux. Il se détendait au fur et à mesure de la marche, se renfrognant peut-être un peu lorsqu’ils repassèrent par l’endroit où ils s’étaient croisés. Il lança un timide regard à Arthémis pour voir si elle aussi y ferait allusion mentalement mais se trouva sans réponse, avant de se sentir bête et d’accélérer un peu le pas pour ne pas la perdre.
Une première porte s’ouvrit. Puis une seconde, séparées par de nombreux escaliers qui le ralentirent avec sa valise. Heureusement pour lui, ça n’était pas bien lourd. Traversant la seconde porte, Nick atterrit dans un appartement… Plutôt moderne. Peut-être pas assez remplit au gout de l’adolescent qui aimait les pièces remplies de meubles. Et finalement, c’est dans une chambre puant la peinture à plein nez qu’ils atterrirent. Par un certain automatisme digne d’un petit bourgeois dérangé, il fourra son nez sous son tee-shirt pour échapper aux dernières odeurs de peinture qu’il trouvait dérangeantes. Ses yeux parcouraient la pièce avant de soudainement loucher sur un trousseau de clef se pointant devant son nez. Secouant la tête pour retrouver sa vue normale, il sortit son nez par politesse avant de hôcher la tête.

« Je te rejoins sur le point d’accroc au sport et qui ne maîtrise pas vraiment l’humour. Donc je pense que ça peut le faire. » dit-il avant de finalement s’emparer du trousseau de clef, ne s’attendant pas à en avoir un. Est-ce qu’elle lui offrait déjà la liberté de sortir où il le voulait et de rentrer quand il le souhaitait ? Son regard finit par dévier sur sa désormais tutrice officielle, qui souriait. Il ne put s’empêcher de le lui rendre l’espace de quelques secondes.

« En fait, je pense que le premier point me concerne aussi. Je vais certainement râler un bon bout de temps avec l’odeur de la peinture. Mais ça devrait aller avec plusieurs jours d’aération je suppose. »

Enfin, sa main quitta sa valise qu’il laissa dans un coin de la chambre soigneusement. Sa curiosité l’emmena vers la fenêtre qu’il ouvrit pour vérifier la vue. S’il ne regrettait pas sa chambre à l’institut, il regretterait néanmoins la vue qu’elle lui offrait sur les hectares de parc.

« Ça va se passer comment désormais ? Tu as des papiers à signer ? Parce que j’ai l’impression qu’adopter un mutant est bien plus simple qu’adopter un humain lambda. »

Se penchant doucement au-dessus du vide pour continuer son inspection des lieux entourant sa nouvelle maison, il resta silencieux de nombreuses secondes, le regard dehors pendant qu’Arthémis énuméra de nombreux points. Certains étaient agréables à entendre. Celui sur la salle de sport par exemple. Sauf peut-être sur la casse. Sur ce point, il ne put s’empêcher de la « rassurer » aussitôt ou bien d’également mettre les points sur les i.

« Je suis quelqu’un d’attentionné. Il n’y aura pas de casse. Tout comme il n’y aura pas besoin d’argent de poche. » annonça-t-il simplement sans bouger et sans bien évidemment parler de la précieuse enveloppe regroupant d’innombrables dollars. Pas question de lui en parler. Pas question qu’on le lui enlève. D’un côté, Arthémis aurait raison d’enlever une telle somme à un pseudo adolescent, surtout ne sachant pas d’où les billets provenaient. De l’autre, Nick se refusait qu’on ne lui enlève, se sachant responsable, bien que matérialiste et aimant se faire plaisir. Il ne s’inquiétait pas de l’endroit d’où ils pouvaient provenir, sur ce point-là, il était serein. Comme s’il savait que cet argent n’était pas volé et qu’il lui appartenait bel et bien.

En entendant comment se passerait la suite de cette tutelle, il fut rassuré d’avoir eu tort. Rien que le fait de pouvoir choisir ou non son tuteur sur la simple présentation d’un dossier correspondant soi-disant à la personne ne ressemblait qu’à une belle bêtise pour le brun. Il se retourna et posa ses fesses sur le bord de la fenêtre pour enfin faire dans un sens, face à Arthémis durant leur discussion. De mécontentement, il sentit son visage se crisper quand elle parla de se faire inhiber ses sens durant la discussion. Pas par rapport à ce moment précis, mais plutôt, par rapport aux autres moments. En prenant en compte le fait qu’elle soit une sorte de louve, il n’avait pas réellement pensé à son ouïe qui lui couperait certainement toute vie privée. Et la suite n’arrangea pas son ressenti d’être quelque part, renfermé et observé. 22 heures la semaine ? Bon sang. Lui qui avait des périodes d’insomnies depuis son accident -peut-être même avant ?- et qui avait pris l’habitude d’aller se promener dehors jusqu’à pas d’heure…

Même si Arthémis alternait les bons points avec les mauvais points, chacun des traits positifs se faisait rayer dans l’esprit de Nick par la nature animale de sa tutrice. Ramener des gens ici. Ça ne serait certainement pas des amis… Seulement des amusements certainement… Mais finalement non. Rien que l’idée qu’Arthémis puisse entendre des gémissements quelconques ou des respirations rapides le gêna immédiatement. Il passerait donc ses moments intimes chez cette autre personne. Ses bras qui s’étaient croisés durant le règlement de la werewolf sans que le mutant ne s’en rendent compte, comprimèrent un peu plus son torse face à la soudaine menace. Son visage reprit son teint froid avec un regard perçant, n’appréciant pas réellement ce genre de procédés, sachant pourtant pertinemment qu’Arthémis n’avait fait que le prévenir et que ça n’était nullement dit sur un ton menaçant.

« Non. J’ai cependant moi aussi quelques points à énoncer… Je n’ai pas besoin que l’on inhibe tes sens durant la visite. Si j’ai un souci avec toi, tu seras la première au courant et la psychologue sera la seconde. A vrai dire, j’aurai plus besoin que tu t’en prives quand je suis ici avec quelqu’un… Mais vu qu’il n’y aura personne étant donné les conditions, il n’y aura pas de problème de ce côté-là. » commença le brun sur un ton qu’il essayait de tempérer. « Deuxièmement, je n’ai pas non plus besoin que l’on me mène à la carotte. Je suppose être allé à cette école de ma propre volonté et mes notes témoignent de mon assiduité et de ma présence en cours. Je n’ai donc aucunement besoin de rappel sur le comportement que j’ai à avoir là-bas. » Il s’éloigna de la fenêtre et se dirigea vers sa valise d’une démarche crispée. Ses doigts attrapèrent un cadre photo sur lequel était présents un homme bien plus âgé mais lui ressemblant étrangement, ainsi qu’une jeune femme approchant la trentaine également. Un enfant d’un peu plus de 5 ans se présentait sur le dos de ce qui semblait être son géniteur.

« Et si ça ne marche pas, il est hors de question que je retourne vivre là-bas. » précisa-t-il sur un ton sec, faisant soudainement exploser la vitre du cadre dans un sursaut. Les brisures de verre s’évadèrent sur les piles de vêtements soigneusement installés, agaçant le jeune qui balança le cadre en bois à côté de sa valise d’un geste colérique. Ses paupières se fermèrent tandis qu’il soupira.

« C’est rien. »

Il préféra prévenir aussitôt Arthémis avant qu’elle ne propose ou fasse quoi que ce soit.

« Ça arrive souvent. » ajouta d’un ton sombre Nick qui s’empara du premier polo pour jeter les morceaux de verres dans la poubelle située à côté de la valise. « Si tu peux fermer la porte en sortant s’il te plait. Même si ça ne servira pas à grand-chose. Ça sera un minimum psychologique… »