Il est étonnant comme, en un claquement de doigt, la vie peut basculer. Un être cher peut partir sans regarder derrière, un passant peut traverser la route sans observer des deux côtés, une moto peut envoyer son conducteur dans le décor. En bref, il semblerait que cette journée allait offrir plusieurs claquements de doigts à Morgan. C’aurait pu être un jour banal pourtant. Il se serait réveillé dans son lit, avec l’envie de rejoindre sa dulcinée dans sa chambre. La journée aurait ainsi commencé et ils auraient passé tout ce temps ensemble, oubliant l’accrochage de la veille en échangeant des baisers remplis de tendresses et de guimauve. Oui, ce début de week-end était déjà tout tracé.

Clac.

Morgan ouvrit ses paupières, grognant après la lumière que laissait passer le volet. Quelle heure était-il ? Pas loin de 9heures. Et la lettre était déjà là. A cet instant, ce n’était qu’une simple enveloppe glissée sous la porte. La curiosité du blond l’entraina vite à se lever pour ouvrir cette surprise. L’écriture de Willow lui décrocha le premier et le dernier sourire de la journée. Un sourire géant qui s’effaça dans un crescendo qui lui parut sans fin.
Prenant à peine le temps d’enfiler un tee-shit et d’attraper son casque, Morgan retrouva sa moto quelques minutes plus tard devant le batiment. Les kilomètres défilèrent, tandis que la distance entre lui et l’aéroport se réduisait. Le visage terne derrière la vitre teintée de sa protection, bientôt, ce fut le sol d’un hall d’entrée qu’il foula. Traversant la pièce en courant, ses yeux recherchaient le panneau des départs. Il ne savait pas s’il était trop tard. La lettre n’indiquait aucunement l’heure, mais juste la destination dont rêvait souvent Willow : le Canada.

Il lui fallut trouver un guichet et un employé pour découvrir que sa chère et tendre avait déjà quitté le sol américain, tout comme son avion. Buguant quelques instants, la précipitation dont fut pris Morgan durant ces dernières minutes s’estompât instantanément. Il n’y avait plus rien à faire. Sur un coup de tête de Willow, leur couple venait de voler en éclats. Sur un besoin de liberté. Sur un besoin de nouvelle vie.

La route du retour fut longue. Atrocement longue. Peut-être n’eut-il jamais pensé rouler un jour à un kilometrage aussi bas. Morgan avait repris la route de l’institut avec un certain automatisme, trop occupé à garder un visage figé devant un amas de pensées. Comme s’il n’arrivait pas à croire en ce qu’il se passait. Tout ça lui semblait comme impossible, malgré ce qu’avait gravé la main de Willow sur son papier. Malgré leurs dernières disputes.

Clac.

Mais à croire que, même perdu dans les pensées les plus profondes, l’Homme gardait un certain réflexe. Son champ de vision fut troublé par l’entrée d’un inconnu. Ses poignets vrillèrent d’un coup sur la droite, tournant le guidon de la moto, envoyant l’engin dans cette direction.

Clac.

« L’obstacle » évité, peut-être que le cœur du mutant aurait pu se calmer, si le virage n’avait pas été sec, l’envoyant droit vers un arbre. Ce fut un réflexe mutant cette fois-ci qui sauva sa propre vie, lorsque son corps se détacha en milliards de molécules, juste avant que la moto n’aille rencontrer le tronc de manière violente.

Le nuage ne se téléporta qu’à quelques centimètres de l’accident, laissant un corps pris dans une trop longue roulade sur le bitume, se reconstituer. Morgan ou en tout cas, son corps, finit par trouver une immobilité au sol, le casque toujours en place.

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Cette journée ne semblait rien lui apporter de bon. Le choc fut minime, même si sa frêle tenue ne lui avait offert que peu de protection, enflammant donc ses bras, ses genoux et ses mollets nus. Garder sa tenue nocturne n’avait pas été une très bonne idée en fait. Le casque aussi, peut-être, en fin de compte : Morgan aurait certainement préféré taper la tête et perdre connaissance, juste le temps de se reposer mentalement. Juste le temps d’être transporté dans un hopital, de se réveiller et de penser que tout ceci n’était qu’un odieux rêve. Juste l’histoire de quelques minutes.

Mais non. Cette journée ne lui offrait rien. Immobilisé sur le côté, légèrement recroquevillé, Morgan grimaçait sous son casque. De douleur. D’énervement. De tristesse. De malchance. Même si ses yeux étaient clos, il sentait la tête tourner autour de lui, sûrement sous le coup de l’adrénaline. Si seulement il n’avait à se soucier que de ça. Une voix –lointaine- résonna dans sa tête. Il avait l’impression de la connaître. Mais même avec ça, il se maudit pour s’être téléporté par automatisme, se disant qu’il aurait du mal à se sortir de cette galère sans expliquer pourquoi il n’a pas suivi le même destin que sa moto.

Cette voix semblait précipitée. De l’inquiétude sonnait dans ses questions. Et à croire le flot de mots qui continuait de sortir… Morgan était dans cet état par sa faute. Ou en partie du moins. Bougeant d’abord ses doigts miraculeusement intacts, le blond finit par rouvrir les yeux, posant son regard vers sa moto qui avait pris un sacré coup. De la fumée s’échappait de son quasi cadavre. Cette journée était à marquée d’une croix noire.

Il était peut-être temps de répondre à son interlocuteur. Il ne fallait pas qu’il appelle les ambulanciers. Le mutant devait le rassurer puis partir. Après tout, l’inconnu pouvait tenir informer les secours de la drôle de scène. Ce fut donc d’abord par un grognement qu’il répondit, avant de daigner se relever sur les coudes avec lenteur. L’un de ses bras quitta le sol, détachant le casque de son menton, avant de le faire tomber à terre dans un léger bruit.

« … ça va ouais… » finit-il par dire, découvrant et redécouvrant toutes les égratignures faites il y a quelques minutes à peine, tiraillé par elles. Son torse tentait de se relever difficilement, tandis qu’encore étourdi, il devait lutter pour maintenir sa tête haute et les yeux ouverts. Sa main utilisée anciennement pour se libérer du casque alla se frotter l’arrière de la tête, avant que celle-ci ne se tourne vers…

« Answ… »

Morgan crut halluciner en voyant son beau-père… Ou son ex beau-père désormais. Ses yeux restèrent grands ouverts devant cette rencontre incongrue. Le destin était contre lui. Il l’entendrait presque rigoler de la situation. Gardant son regard quelques secondes sur lui, Morgan finit par poser son front sur son avant-bras au sol, lâchant une injure. Il était tiraillé entre l’envie de l’assassiner de questions à propos de Willow, l’envie de se déchainer sur lui pour le départ de sa fille, ou l’envie de lui rejeter toute la faute de cette journée maudite. Ses émotions étaient telle qu’il avait peur de se transformer en Morgane. A vrai dire, il se laissa l’espace de quelques secondes le droit de s’en étonner, avant que son esprit ne soit à nouveau envahie par la Moore.

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Serrant les dents, torturé par les griffures du bitume, Morgan resta le front sur son avant bras quelques secondes, comme pour laisser passer la douleur. Peut-être s’atténuerait-elle ? Certaines personnes se faisaient du mal lorsqu’elles n’allaient pas bien mentalement. Ce fut le cas pour Morgan, il y a de nombreuses années, après la découverte de sa mutation. Mais suite à cette expérience, il s’était rendu compte que ça ne marchait pas sur lui. Tout comme à cet instant : la douleur physique ne semblait pas lui faire oublier son mal être mental ainsi que toutes les émotions que le départ de Willow laissait derrière. Au contraire. Les deux sonnaient et enterraient ensembles, main dans la main, le mutant. Et c’est une troisième main qui s’ajouta. Ou plutôt une voix. Celle d’Answald. Normal. Il n’allait pas repartir comme ça, comme si de rien n’était après l’accident, encore moins suite au départ de sa fille aka la petite amie de l’accidenté.

Et pourtant. Il aurait préféré qu’Answald s’en aille. Pour ne pas se prendre la colère de son ancien beau fils de plein fouet. Il l’appréciait. Il avait autrefois flashé sur lui. Il avait été le père de sa chère Willow. Morgan ne voulait pas s’en prendre à lui. Pourtant sa voix et les mots qu’il lâchait, aussi désolés pouvaient-ils être, renforçaient la boule au ventre qui s’était formé.
Par chance, quelques curieux commençaient à s’approcher, pour vérifier ce qu’il se passait entre le blessé et l’homme qui se trouvait à ses côtés. Quand Morgan se sentit assez libéré de ses brulures et assez enragé, sa tête se releva, fixant les idiots trop prêts. Autant s’en prendre à eux…
« J’ai rien, putain… Cassez-vous… » maugréa le blond à l’assemblée. Aucune réaction. Morgan se releva en grimaçant, observant Answald. « Ouaip… Willow m’a « prévenu »… Si on peut appeler ça prévenir… » Il baissa d’un ton : « une putain de lettre à la dernière minute… » Sa voix reprit de l’ampleur : « Pourquoi tu t’excuses ? C’pas toi qui a écrit ça… » grogna le blond, testant l’une de ses chevilles tremblantes, avant de rejoindre sa moto ainsi que toutes les pièces à terre. Au fur et à mesure qu’il voyait l’étendu des dégâts sur son véhicule, il sentait la pression monter. Tout comme Morgane arriver, finalement.

« Non… J’dois pas… » se chuchota-t-il. N’ayant plus porté son attention sur ceux qui l’entouraient, Morgan se releva brusquement et se heurta à un duo de policiers. S’il allait bien ? Plutôt. S’il avait les papiers de la moto ? Non. Morgan était tellement parti de manière… Précipitée. Aussi précipitée que l’envie de sortir de Morgane.

« Je-J’ai rien je dois partir je… » commença le mutant, tentant de passer à travers le duo de policiers. Mais aussi solides qu’une barrière, il lui fut impossible de s’enfuir. La tension commença bien vite à monter entre le trio. Tout comme les voix et les gestes des deux employés. La voix de Morgan, elle, se faisait tremblante, basse et répétitive jusqu’à…

«LÂCHEZ-MOI!»

A peine eut-elle lâché ses mots que son corps disparut. Le nuage formé s'échappa dans une direction avant de flotter sur place... Et de partir dans la direction d'Answald, happant son corps au passage. La forme plus volumineuse continua sa route sur plusieurs centaines de mètres, s'éloignant de la masse étonnée.

Une fois éloigné suffisamment des regards indiscrets, le nuage lâcha de sa masse par terre, rejetant le corps d'Answald avant de poursuivre sa course dans une vieille maison semblant abandonnée, un peu plus loin. Son propre corps d'un mètre cinquante reprit forme. Il n'en fallut pas plus à la mutante pour laisser ses poings s'acharner contre un vieux mur décrépit tandis que des larmes et des perles de sang coulaient.

«PUTAIN DE MERDE FAIS CHIEEEEEEEER !»

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Durant une longue minute, les coups s’enchainèrent, durant lesquelles le vieux bois composant un mur s’effritait sous la violence de Morgan, se vengeant en lui offrant plusieurs échardes. Sa rage défilait sur son visage et dans ses gestes mais ne semblaient pas vouloir s’évanouir. Tous ces sentiments accumulés formaient une trop grosse masse de colère, tout bonnement incapable de tout juste s’apaiser. Peut-être qu’avec le temps, tout cela allait se calmer ? Avec le temps, oui. C’est pourquoi Morgane continua sans relâche de martyriser ses poings jusqu’à entendre une voix familière : celle d’Answald. Encore. Il ne voulait plus le voir et pensait avoir été assez clair en le larguant en chemin. Mais en plus de ne pas avoir compris, il ne faisait qu’aggraver la situation en parlant encore et encore de Willow, d’un possible retour, qu’elle ne l’avait pas abandonné. Peut-être voulait-il apaiser Morgan. C’était certain même, que c’était son but. Mais les deux ne semblaient pas se retrouver sur cette même longueur d’onde.
Si ses coups s’étaient arrêtés, laissant désormais ressentir une certaine douleur au niveau des phalanges, ses hoquets et ses reniflements, eux, continuèrent, essayant pourtant de ne pas s’additionner aux paroles qui étaient déjà péniblement audibles. Elle avait envie de l’écouter, de se dire qu’il avait raison mais l’égoïsme dont avait fait preuve Willow semblait contagieux.

Quand la voix d’Answald disparut, la raison n’avait toujours pas reprit le dessus chez la mutante qui s’essuyait le nez avec sa manche. Rien d’interessant. Answald ne sera pas celui qui l’aidera à apaiser sa peine apparemment. Il était temps de partir, il n’était pas question qu’il découvre Morgane.

Pourtant le corps ne se désintégra pas. Pas totalement en fait. Alors que le corps commençait à se transformer en nuage, elle reprit sa forme normale. Fronçant les sourcils, la mutante recommença plusieurs fois avant de paniquer et d’accroître ses larmes. Ses yeux balayèrent la pièce avant de trouver une porte. Ni une ni deux, la petite blonde s’y dirigea et l’ouvrit pour se retrouver pile face à Answald. L’écho que produisait cette maison quasi-vide avait trompé Morgane qui pensait son ex beau-père beaucoup plus loin. Sans avoir réfléchit, elle venait de créer la situation qu’elle avait souhaité fuir. Elle eut envie de prendre ses jambes à son ou, ou bien d’insulter le mutant pour le faire partir, pour lui faire sentir toute la haine qu’elle avait envers sa fille mais non. Figée, crispée, elle resta face à Answald, se sentant incapable de faire ou dire quoi que ce soit d’autre qu’un « laisse-moi tranquille… », pleurant comme une gamine.

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Le regard qu’Answald posait sur Morgan était assez intimidant pour elle. Bien que son coup de cœur pour lui s’était apaisé depuis des mois, et bien que le regard ne montrait que de bons sentiments, le fait de se faire fixer par un homme… Alors qu’il était dans son corps féminin et qu’il pleurait… Etait dérangeant. Morgane baissa son regard et l’évitait du mieux qu’elle le pouvait, observant les alentours, bien qu’il n’y avait rien à regarder à part des toiles d’araignées et de vieilles fissures. Elle ne put cependant s’empêcher de rigoler en entendant Answald. Mais oups, peut-être que ce n’était pas vraiment le moment ni un sujet marrant pour en rire. La blonde savait très bien de quoi parler Answald, narré par Willow il y a de longs mois.

La paume de sa main continuait d’essuyer les larmes qui ne cessaient de couler, ce qui l’agaçait fortement. Morgan n’était pas vraiment habitué à pleurer. A pleurer autant, en tout cas. Un haussement d’épaules répondit à la question que posait Answald, en y ajoutant un petit ricanement. Elle faisait tout pour que ça aille mieux mais la situation était difficile à oublier en quelques minutes. Aucun mouchoir ne semblait présent, tant pis, ce fut alors si tee-shirt qui servit comme tel, dévoilant quelques secondes la peau de son ventre. « Pas grave.. » Concentrée sur les paroles d’Answald, bien que ne le regardant pas, sa voix semblait étrange. Comme s’il se retenait. Tout comme quand elle-même, plusieurs minutes auparavant, avait tenté de garder son calme dans la foule.

Elle tenta un regard vers lui, pour voir si elle avait raison, s’il pleurait. Mais non. Il restait fort. Morgane trouvait son comportement exemplaire et aurait voulu savoir comment avoir une telle maîtrise de soi. Elle avait l’impression encore une fois d’être une gamine devant un adulte fait. Mais avait-il réellement raison ? Morgane se rappelait de son propre père, voulant faire de lui un homme fort, lui radotant tout petit déjà que les hommes ne pleuraient pas. A coté de ça, il voyait encore sa mère engueuler son mari avant d’ajouter à son fils que chacun avait le droit de montrer ses sentiments, quels qu’ils soient.

Les mots d’Answald semblaient lui faire partager le même état d’âme que la blonde. Tous les deux semblaient se sentir fautifs de la fuite de Willow, tous les deux encore incapables de la comprendre. Morgane ne put s’empêcher d’ajouter «Et moi, t’as vu le copain que je fais … » elle ricana doucement, faisant référence à sa mutation, avant de soupirer et d’essuyer une nouvelle fois ses yeux « On est vraiment nuls bon sang… » Elle lui fit un léger sourire, se laissant soudainement aller dans un flot de mots. « Sa mère sait peut-être quelque chose… C’est bête mais j’me rends compte que je ne la connaissais pas tant que ça… Jamais je n’aurai pensé qu’elle puisse tout plaquer du jour au lendemain… Je sais même pas si c’est du courage ou une fui… » Morgane s’interrompit, se rendant compte qu’elle adressait ces mots au père de la concernée. « Enfin je… Pardon, je voulais pas penser ça… putain je crains… Tout ça craint… » finit-elle par se dire en pensant soudainement à la moto. Prise de panique, elle réfléchit quelques secondes. « J’ai… Ils vont me retrouver avec la plaque de ma moto… Ils m’ont vu me transformer, ils nous ont vu disparaitre… ça va nous retomber dessus… Sur l’institut… Bon sang… »

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Le regard qu’Answald posait sur Morgan était assez intimidant pour elle. Bien que son coup de cœur pour lui s’était apaisé depuis des mois, et bien que le regard ne montrait que de bons sentiments, le fait de se faire fixer par un homme… Alors qu’il était dans son corps féminin et qu’il pleurait… Etait dérangeant. Morgane baissa son regard et l’évitait du mieux qu’elle le pouvait, observant les alentours, bien qu’il n’y avait rien à regarder à part des toiles d’araignées et de vieilles fissures. Elle ne put cependant s’empêcher de rigoler en entendant Answald. Mais oups, peut-être que ce n’était pas vraiment le moment ni un sujet marrant pour en rire. La blonde savait très bien de quoi parler Answald, narré par Willow il y a de longs mois.

La paume de sa main continuait d’essuyer les larmes qui ne cessaient de couler, ce qui l’agaçait fortement. Morgan n’était pas vraiment habitué à pleurer. A pleurer autant, en tout cas. Un haussement d’épaules répondit à la question que posait Answald, en y ajoutant un petit ricanement. Elle faisait tout pour que ça aille mieux mais la situation était difficile à oublier en quelques minutes. Aucun mouchoir ne semblait présent, tant pis, ce fut alors si tee-shirt qui servit comme tel, dévoilant quelques secondes la peau de son ventre. « Pas grave.. » Concentrée sur les paroles d’Answald, bien que ne le regardant pas, sa voix semblait étrange. Comme s’il se retenait. Tout comme quand elle-même, plusieurs minutes auparavant, avait tenté de garder son calme dans la foule.

Elle tenta un regard vers lui, pour voir si elle avait raison, s’il pleurait. Mais non. Il restait fort. Morgane trouvait son comportement exemplaire et aurait voulu savoir comment avoir une telle maîtrise de soi. Elle avait l’impression encore une fois d’être une gamine devant un adulte fait. Mais avait-il réellement raison ? Morgane se rappelait de son propre père, voulant faire de lui un homme fort, lui radotant tout petit déjà que les hommes ne pleuraient pas. A coté de ça, il voyait encore sa mère engueuler son mari avant d’ajouter à son fils que chacun avait le droit de montrer ses sentiments, quels qu’ils soient.

Les mots d’Answald semblaient lui faire partager le même état d’âme que la blonde. Tous les deux semblaient se sentir fautifs de la fuite de Willow, tous les deux encore incapables de la comprendre. Morgane ne put s’empêcher d’ajouter «Et moi, t’as vu le copain que je fais … » elle ricana doucement, faisant référence à sa mutation, avant de soupirer et d’essuyer une nouvelle fois ses yeux « On est vraiment nuls bon sang… » Elle lui fit un léger sourire, se laissant soudainement aller dans un flot de mots. « Sa mère sait peut-être quelque chose… C’est bête mais j’me rends compte que je ne la connaissais pas tant que ça… Jamais je n’aurai pensé qu’elle puisse tout plaquer du jour au lendemain… Je sais même pas si c’est du courage ou une fui… » Morgane s’interrompit, se rendant compte qu’elle adressait ces mots au père de la concernée. « Enfin je… Pardon, je voulais pas penser ça… putain je crains… Tout ça craint… » finit-elle par se dire en pensant soudainement à la moto. Prise de panique, elle réfléchit quelques secondes. « J’ai… Ils vont me retrouver avec la plaque de ma moto… Ils m’ont vu me transformer, ils nous ont vu disparaitre… ça va nous retomber dessus… Sur l’institut… Bon sang… »

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Prise de panique et sous la fatigue, la folie envahissait le cerveau de la blonde, qui était déjà en train de prévoir un plan l’obligeant à retourner là-bas déguisée, récupérer sa moto, effacer toutes les données retenues sur cette affaire et…

Morgane reposa les pieds sur terre quand Answald proposa diverses solutions comme demander de l’aide à l’institut ou quelque chose à essayer par lui-même. Curieuse, elle s’arrêta de chouiner et attendit voir s’il allait annoncer son plan. Et ce fut tout autre chose qui arriva, faisant sursauter la mutante, retenant un petit cri de surprise. Sa moto ! Ou plutôt, ce qu’il en restait. Mais elle était là ! Sous ses yeux ! La partie la plus intéressante serait le moment ou la mutante devrait extraire ce cadavre d’ici, mais soit. Answald en avait déjà tellement fait, qu’elle lui aurait volontiers offert une accolade mais… Le contexte était trop bizarre pour oser faire cela. De plus, si elle était habituée à avoir un comportement beaucoup plus doux voir sensible en tant que femme… Elle ne devait pas oublier que son ancien beau-père devait être sacrément perdu, ayant serré précédemment dans ses bras son ancien beau fils sous sa forme inconnue féminine mais qui restait tout de même un homme à ses yeux. Certainement.

« Ca devient de plus en plus bizarre… » se chuchota-t-elle avant de quitter sa moto des yeux et de s’adresser à Answald « Je l’espère aussi… » rajouta la blonde en lâchant un soupir d’éreintement. Même si elle avait ressenti le soleil sur sa peau égratignée aujourd’hui, elle eut l’impression d’avoir passé la journée dans un trou sombre, n’ayant connu un minimum de chaleur que par l’attention de son aîné. Aîné qui d’ailleurs, passa à autre chose, annonçant aller parler à son ex-femme. Hôchant la tête en toute réponse, la blonde le laissa tranquille et rejoignit sa moto dont elle était tellement fière. Elle était dans un sale état et même le meilleur garagiste ne saurait la remettre en état. C’était une boite de conserve vide et sans intérêt. Et pourtant, tout comme pour Willow, elle avait l’espoir que tout redevienne normal. Qu’avec deux ou trois coups de bras, l’engin serait à nouveau en état de rouler et de l’emmener loin pour se changer les idées.

Basculant la moto sous un autre angle, la blonde se mit à reprendre ses observations interrompues par la foule au dehors précédemment, bidouillant quelques pièces, appuyant sur la carrosserie pour essayer de la décabosser. Mais rien n’y faisait. Elle finit par s’asseoir contre le siège passager, laissant sa tête tomber en arrière, posant ses yeux indiscrets sur la silhouette d’Answald, emparée d’une soudaine prise de conscience. Attendant le moment ou le mutant aurait fini avec son téléphone, elle s’éclaircit la voix pour attirer son attention.

« Je… Viens de m’apercevoir que… A chaque fois qu’on se voyait...Bon… Ca reste rare et… » elle rigola « Chaque fois le scénario est catastrophique. Mais chaque fois t’es là, tu m’aides. Et je te remercie jamais. Tu te prends mon sale caractère en pleine face, tu te retrouves avec ma deuxième apparence sans explication et… T’encaisses toujours. Tu souris toujours. Tu positives toujours alors qu’on se fait traquer par des démons, que ta fille disparait, que je manque de te renverser… Et c’est moi qui me plaint et toi qui relativise et… Je t’envie beaucoup. C’est bête à dire mais… » Elle s’arrêta quelques instants, pensant ses mots « Malgré tout ce que tu as pu faire par le passé, malgré tout ce que l’on a pu te reprocher… Tu es un véritable modèle pour moi et… Merci. »

Morgane se rendit compte à la fin du monologue qui pouvait être assez gênant et étrange de sa part. Gênée elle-même, elle finit par se gratter l’arrière de la tête « Et désolée aussi. »

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Morgane perdit bien rapidement son sourire quand Answald prit la parole, démentant quasiment la totalité de ce qu’elle venait de lui dire. La blonde laissa quelques moues apparaître à plusieurs moments du monologue sous estimant totalement la personne en train de le formuler. Plusieurs fois, elle tenta de prendre la parole, mais aussitôt rattrapée par l’adulte qui continuait éternellement à se rabaisser. Finalement, ce fut l’annonce d’une Shannon hors de la confidence tout comme son ex mari et son ex beau fils qui mit un terme à toute cette attente.

La mutante baissa la tête vers le sol en entendant cette réponse. D’un côté, elle apportait un certain lot de réconfort car la disparition de Willow n’était pas qu’à cause de son père et de son copain peut-être. Elle semblait être partie sans avoir prévenu qui que ce soit. Laissant un énorme soupir s’échapper, la Collins se releva prudemment, agacée.

« Je sais même pas ce qu’on fout encore là, sérieusement… Comme si restait là allait nous donner plus de réponses sur la disparition de Willow… » râla-t-elle, avant d’enlever toute la poussière présente sur ses vêtements. Observant sa moto, Morgane mit une bonne minute pour enlever les deux plaques d’immatriculations rattachées au véhicule. Quand cela fut fait, plaques à la main, elle se tourna vers Answald :

« Juste… Par rapport à ce que t’as dit… Je ne sais pas tout de toi… Et je ne sais pas mieux que toi. Et je sais que mon avis n’est peut être rien par rapport à ton propre avis sur toi-même mais… Tu es une personne bien sans aucune once de mauvais. Peut-être avec beaucoup de maladresse mais… Essaye de… Voir les bons côtés de ta personnalité. Tu as toi-même dit sourire pour que j’aille mieux. Terrifié ou pas, tu essayes d’endosser un rôle qu’on t’a collé à la peau sans demander ton avis. Ca prouve beaucoup de choses déjà… Et… Faut qu’on arrête cette scène mélodramatique, sérieusement. » dit-elle en joignant ses mains, rigolant un peu. « On rentre à l’institut ? On y sera mieux. » dit-elle avant de se souvenir que l’ainé avait sa propre habitation. « Ah non, t’y es pas… Tu… Tu rentres chez toi là.. ? Si oui, je peux t’accompagner ? J’ai plus de nouvelles de Kysten et… J’aimerai en profiter… » demanda la blonde, se sentant gênée d’obliger Answald à devoir la supporter encore. Même si elle disait la vérité, le fait de se retrouver seule commençait déjà à effrayer la Collins.

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