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Blue velvet [Flynn]

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MessageSujet: Blue velvet [Flynn] Blue velvet [Flynn] EmptyDim 29 Jan 2017 - 22:58

« Blue Velvet »
ft. Flynn

Dans le ciel assombri, se dessinaient quelques nuages gris, prêts à exploser. Charlie se dandinait en resserrant de ses petits bras menus la doudoune bleu roi qui lui couvrait le dos, elle avançait de sa démarche habituelle. Fébrile, puérile, d'une candeur poétique. Je la suivais, me renfrognant dans mon imperméable beige. Sa chevelure blonde ruisselait, tandis que ses bottines boueuses s'enfonçaient sur le paillasson. Elle retirait son manteau, pressée de s'étendre sur le canapé mollement. Je restai muette. Comme si l'on venait trouer mon estomac à coup de poignard. Je n'avais pu lutter et les grands yeux bleus de la petite fille s'affichaient d'une insouciance cruelle. Les mêmes yeux que Tomi. Je passais ma langue contre mes dents d'un mouvement répétitif, inlassable. Qui me faisait oublier la notion du temps, pour mon plus grand bonheur. Cette rencontre à l'Underground me secouait, et je taisais toutes mes questions sans réponses derrière une moue muette. Une façade insensible. Mes semelles claquaient sur le carrelage de la maigre cuisine. Le tout était en vrac, quelques poêles restaient sur les plaques éteintes, des miettes recouvraient la table en bois. Je regardais la scène, comme une spectatrice. Usée de la tête aux pieds, au point de m'affaler sur l'une des chaises dans un bruit sourd. Je ramenai aussitôt mon visage en larmes contre mes avant-bras. Pour camoufler les pleurs, les cris. La vive douleur du passé qui m'avait assailli. J'avais saisi un mouchoir en papier pour l'appuyer contre mon nez rougi. J'enfonçais le mal, pour le rendre d'autant plus fort. Je grelottai sous ma camisole blanche, me servant de mon pull comme un oreiller où abattre ma tête qui semblait alors si lourde sur des épaules si frêles. Le passé m'avait rattrapé, enterrant mes rêves de bonheur, une bonne fois pour toute. Les tong en plastique de Charlie annoncèrent finalement sa venue. Elle ne riait plus d'une voix cristalline, fluette et innocente. Elle s'avançait, en fronçant les sourcils. J'essuyai mon visage baigné de larmes, aussitôt qu'elle vint s'asseoir face à moi. Je relevai la tête, en lui esquissant un sourire peu convaincant. Elle triturait son pyjama violet, le regard rivé vers ses pieds blancs. Et ce visage angélique rayonnait devant mes pommettes tremblantes que je cachai d'un revers de main. J'approchai mes lèvres de son front d'un élan maternel. Protecteur. Elle sourit, en fermant ses yeux de poupée. Je les fermai à mon tour, contenant quelques dernières larmes dans mes cils. Et, la mâchoire serrée, je lâchai d'entre mes lèvres pincées:

«  Bonne nuit. »

Et, elle se retournait dans son lit miteux. Je soufflai, de soulagement. Pour la nuit, seuls les rêves viendraient envahir sa tête. Plus de doute, de question. Plus de maman, plus de papa. Juste des rêves pour l'esprit tendre de Charlie. Renfilant l'imper contre mes hanches saillantes, je m'éclipsai de l'appartement sans dire mot, sans explication, qu'une bonne nuit à souhaiter avant de passer la triste mienne. Avant de partir, un simple coup d'oeil vers un bocal de verre dans lequel on pouvait voir gésir quelques billets froissés. Pas assez selon le regard attendri que je portais vers l'enfant assoupie. Je m'échappai alors d'un pas pressé jusqu'au coin des bars. Ils étaient illuminés de quelques néons éclatants dans lesquels je perdais mes prunelles luisantes. La nuit ne m'était pourtant jamais paru aussi sombre. Dans le premier bar, je me faufilai vers les vestiaires, m'emparant d'un verre de vodka sur l'une des tables. Sur l'un des paravents suspendait une robe d'un bleu électrique, à paillettes et aux pieds de l'armoire résidaient de hauts talons que je me dépêchai de mettre. Il n'y avait plus qu'à laisser mon corps s'abandonner à la musique. Que la mélodie bouge ma tête, mes bras, mes hanches, et mes jambes. Que je me laisse assourdir par le rythme idiot. Je me laissais donc aller à danser. Sans ne plus penser à Tomi, à Charlie, à mes conneries, à ce que j'avais fait et ce que j'aurais dû faire. Après de nombreuses minutes passées à me trémousser en tâchant d'oublier ce qu'il se passait, je sautais de la scène pour rejoindre un visage qui m'était familier. Je saisis une autre bouteille, et m'avançant à la table de l'homme dont je reconnaissais régulièrement les traits, je m'asseyais sur le tabouret qui lui faisait face. Je posais la bouteille, sans faire attention me contentant de plonger mon regard dans le sien. Des pupilles dans lesquelles j'aimais m'égarer. Flynn. Sous l'éclat des spot, son regard droit semblait d'autant plus envoûtant. Ses cheveux presque auburn retombaient contre ses tempes, et il sembla que je pus déceler un sourire arrogant sous cette expression joueuse.

«  Salut. », lançai-je simplement en balançant ma jambe pour que celle-ci frôle la sienne.

Je rabaissai le tissu pailleté contre mes cuisses presque dénudées, et faisant tournoyer l'une de mes mèches blondes autour de mon indexe, je saisis la bouteille pour en boire au goulot quelques gorgées. Celles-ci pétillaient alors dans mon palais comme des myriades de feux d'artifice dans un ciel sans espoir. Une lumière, l'alcool. Mais lorsque j'affrontai le regard de Flynn, tout mon corps en était chamboulé, les larmes se fondant un passage jusqu'à mes cils que je battais en vain. En simple explication, d'un ton cette fois sec, je déclarai en détournant le regard:

«  Mauvaise journée. »

Je lui tendais la bouteille en dernier lot de consolation. Que nos palais pétillent au rythme de sanglots étouffés.
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