Théophile regardait les clés qu’il avait en main. Il laissa échapper un long soupir, d’un air clairement entrain de dire qu’il n’avait aucune envie de faire ce qu’il allait devoir faire.
Cela faisait pourtant des mois qu’il gardait la même clé sans jamais l’avoir rendu à son propriétaire.
Mais de fait, il allait bien devoir être obligé.
Prenant son courage à deux mains, il s’envola, poussé par le vent.
Il savait ce qu’il allait faire. Rentrer discrètement, poser les clés, et vite partir.

Première étape. Rentrer discrètement. Théophile tourna doucement les clés dans la porte, constatant que de toute façon le manoir était ouvert. Nous étions en plein après-midi. Théophile retira les clés et ouvrit la porte doucement, regardant aux alentours, se faufilant le plus souplement possible dans le hall avant de se précipiter dans le salon.
Une fois cela fait, il mit les clés sur la table.

Voilà. Il ne restait que la deuxième étape : partir le plus vite possible. Facile, simple, rapide et…
Et non en fait.
Parce qu’un bruit se fit entendre. Un bruit qui pourrait appartenir à quelqu’un qui pourrait voir Théophile. Et avec la malchance que se tapait le sorcier ces temps-ci, à tous les coups, cela pouvait parfaitement être le propriétaire du manoir. Gregory.

Le brun regarda autour de lui, cherchant une solution, et avant que quelqu’un ne le voit, il n’était plus que de l’air. S’en rendant compte, il voulut foncer en direction de la sortie, avant de se rendre compte que la silhouette provenait de là.
Changement de plan de secours.
Il fonça dans la cave.
Mauvaise idée sûrement, mais rien d’autre ne lui était venu, et il avait oublié que sous sa forme d’air, personne ne le verrait. Tant pis, trop tard, il n’avait pas eu le temps de réfléchir.
Traversant l’interstice de bas de porte, il atterrit dans l’endroit le plus lugubre du manoir, avant de finir au sol brusquement, ne sachant pas contrôler correctement la retransformation en humain.

Oups

S’en rendant compte, il se redressa rapidement, et regarda autour de lui, avant d’aller lentement vers la porte pour tenter d’en sortir.

Double oups

La porte était fermée. Et il ne restait alors plus qu’à réussir soit à redevenir de l’air, soit à attendre que cette porte s’ouvre pour pouvoir sortir.
Théophile tenta de se concentrer, mais redevenir de l’air était plus difficile que prévu. A croire que l’évolution étrange de son pouvoir, n’était vraiment pas aussi amusante qu’il l’aurait voulu.
Comprenant qu’il était piégé, il ne lui restait plus qu’à attendre, ce qui correspondait à l’option qu’il aurait réellement préféré ne pas avoir à devoir subir.

C’est une journée comme les autres. Ni agréable, ni mauvaise. Juste… une journée. Je m’occupe de mon jardin, m’assurant d’avoir des herbes de bases pour réaliser des potions. Je voulais en essayer une nouvelle, une qui tiendrait à carreau les démons. Si ça marchait, je suis certain qu’Edriss serait fier de moi. Et ça pourrait lui être énormément profitable. J’espère que ça va fonctionner… Je finis rapidement mon inventaire avant de me diriger vers ma demeure. Quand j’entre, je me rends compte que quelque chose n’est pas pareil. Quelque chose est arrivé… une… présence. Comme un coup de vent.

Je regarde autour de moi, les sourcils froncés. Mes domestiques m’auraient averti s’il y avait un invité. Alors… ce n’est pas un invité. Je gronde un peu et marche dans ma demeure, essayant de voir qui peut bien être entré sans mon autorisation. En entrant dans le salon, je remarque quelque chose : Des clés. Mes clés. Celles que j’avais données à un certain gamin pour qu’il fasse mon ménage. Oh… Les choses devenaient… intéressantes. Je souris et continue mon inspection. Il doit bien être quelque part, mais où? Il connaît bien la maison pour l’avoir nettoyer quelque fois. Il doit savoir les sorties… à moins qu’il ne soit pas sortie. Le coup de vent quand je suis entré!

Je me précipite vers l’entrée, regardant autour de moi. La seule direction qu’il a pu aller sans que je le voie, c’est la cave. Je m’y dirige lentement, ne voulant pas effrayer le petit oiseau. Il ne faudrait pas qu’il s’enfuit. J’arrive alors devant la porte fermée… et barrée. Je gronde un peu. Il n’est pas là? Pourtant… Je cogne doucement à la porte.

-Oh Théo! Je sais que tu es là… ~ Ça fait longtemps que tu n’étais pas venu! Je me suis ennuyé! Hahaha…

En fait, plus que double oups, il s'avérait que c'était....Triple oups
Théophile avait choisi le pire lieu de tout le manoir. Le lieu sans fenêtre, sans issue, sans aucun moyen de partir.
Mais surtout. Le lieu le plus "enfermé" de toute la bâtisse. Un endroit étroit, qui déjà de base ne l'avait jamais tant rassuré que ça.
Un endroit fermé.
Complètement.
Et Théophile avait oublié un léger détail dans l'opération. Outre le fait que de redevenir de l'air semblait impossible, le fait qu'il soit claustrophobe n'allait aider en rien, et rapidement, il se sentit mal.

Sa respiration déjà, se faisait difficile, et il se sentait transpirer. Il devait s'échapper d'ici. Mais le seul moyen, serait de prévenir le propriétaire de la demeure dans laquelle il se trouvait.
A sa grande honte, et a sa grande colère aussi. Mais déjà, il se tenait au mur, tentant de garder son calme.
Jusqu'à ce qu'une voix lui parvienne aux oreilles. Une voix qu'il s'était mise à détester, et qui lui arracha une grimace de haine, entre deux souffles coupés.
Bon, au moins allait il pouvoir demander à sortir... Mais il n'en avait strictement aucune envie. A la place, il s'entendit jurer :

- Connard

Rester enfermé dans un endroit qu'il détestait ne le rendrait pas bien poli. Et se savoir enfermé ne l'aidait pas à rester calme et à retrouver son bon sens. D'autant que son état empirait doucement.

- ...Ouvre moi...

Plus que le ton froid abordé il y a quelques instants, cette fois, c'était presque une forme de supplication. Parce qu'il n'avait pas le choix. Il se rapprocha de la porte, respirant comme il pouvait.

- Ouvre moi...Et on se revoit plus jamais...Je t'ai rendu tes clés... Alors...Arrête de te foutre moi...

Il faisait noir en plus. Il faisait humide. Opressant. Théophile devait sortir...

- Et...ou....vre moi...

Reprendre son souffle. Fermer les yeux. Ne pas penser qu'il est à l'étroit. Ne pas y penser. Ne pas y penser. Mais à jouer à ça, il y pensait encore plus. Aucun moyen de redevenir du vent dans cet état.

Il s’attendait à des paroles, à quelque chose, même juste à une moquerie. Mais Théophile ne récolta que du silence. De l’apathie totale.
Grimaçant, il gratta à la porte, continuant de supplier, sentant les larmes lui piquer les yeux tandis que son souffle se brisait à petit feu. Il devait sortir de là. Il devait sortir de là…. Mais c’était sa propre faute s’il était venu ici. Il ne pouvait s’en prendre qu’à lui. Pour quelqu’un censé être doué pour la fuite, il s’était totalement raté.
Et si Gregory avait décidé de le laisser là pour toujours ? Théophile sentit son souffle se couper un peu plus, et il s’accrocha à la seule idée positive du moment : Antonella. Antonella. Il répéta ce nom plusieurs fois. Se remémorant son odeur. Son sourire. Sa voix. Ses goûts. Sa façon de prononcer le mot pie. Leurs baisers.
Mais cela ne l’empêcha pas de suffoquer et de pleurer. Il restait cet oiseau enfermé.

Soudain, il entendit un bruit, et vit de la lumière. Un visage. Celui de Gregory. Il n’eut même pas le courage de le fusiller du regard, il se sentait trop faible pour ça. Il avait besoin d’air. Il devait saisir l’air. A peine fut il tiré pour sortir de cette cave qu’il haissait, qu’il attrapa un peu d’air avec son pouvoir pour se sentir mieux.
Il se laissa entrainer, même si une voix en lui hurlait de se débattre et de partir le plus loin possible. Mais Théophile n’en avait actuellement pas la force.

Il grimaça quand même quand Gregory lui fit une remarque sur le fait que se cacher dans la cave n’était pas la meilleure idée du monde. Mais Théophile n’avait pas eut le temps de réfléchir.
Regardant la boisson, il eut ce désagréable souvenir de la dernière fois qu’il avait bu quelque chose ici.
Il poussa le verre sans même réfléchir, le laissant se briser au sol.

- Je ne boirais rien qui viendra de toi…

Sa voix tremblait, et il ressentit une difficulté pour parler, bégayant alors en même temps. Il détesta devoir se sentir aussi mal, mais n’avait pas le choix après ce qu’il s’était passé.

- Je vais rentrer.

Enfin, s’il pouvait se lever, vu qu’il avait cette désagréable impression d’être bloqué. Mais même dans cet état, il parvint à rassembler du vent pour le soulever à quelques centimètres du sol.

- Je te déteste, et il est hors de question que je reste une minute de plus

Il ressentait encore cette difficulté à parler, et ne pouvait pas passer outre, mais ça ne changeait rien. Malgré la panique qu’il venait d’avoir, il refusait de rester avec ce type qui pourrait s’amuser de lui dans la seconde qui vient. Pourtant, le vent le lâcha aussi brutalement qu’il l’avait porté, et Théophile tomba au sol, gémissant, et regrettant d’être encore mal.

Theophile manqua de se debattre et de frapper Gregory quand celui ci l'attrapa. Il termina à nouveau sur une chaise et détestait toujours cette sensation de faiblesse.
Il le fixa malgré tout, les yeux encore rouges et piquants d'avoir pleuré de cette prison dans lequel il se trouvait.

Il entendit ses menaces et eut envie de lui cracher dessus. Théophile ne voulait pas croire un seul mot de Gregory quand celui ci disait vouloir l'aider.
Il ne boirais pas ce verre. Il ne voulait pas le boire. Il devait partir d'ici mais jamais il ne boirait une nouvelle chose concocté par Gregory.
Et tant pis pour les menaces de cauchemar. Théophile avait suffisamment subi l'enfer pour refuser de boire la moindre chose venant d'ici.
Malgré son état il ignora l'ordre et laissa de côté le verre.
Avant de se dire que Gregory risquait de lui faire boire de force. Il se saisit de l'objet et le vida au sol.
Tout en fixant Gregory

- Je ne boirais. Jamais. Quelque chose. Qui vient. D'ici.

Il était parvenu à parler assez distinctement et tentait de rassembler le plus d'air possible dans le doute. Après tout....Il venait de désobéir.
Il était prêt à balancer tout ce qu'il avait sur Gregory.

Malgré la défense qu'il voulu avoir, la gifle parta trop vite pour qu'il eut le temps de riposter.
Théophile sentit sa tête tourner et grimaca. Mais ce n'était pas la première gifle qu'il recevait de ce type odieux qu'il haïssait plus que tout.
Un goût amer semblait coller à sa gorge et il s'efforça d'ignorer la douleur d'avoir son menton aussi serré que ça. Théophile s'efforçait de continuer de fixer Gregory avec haine. Ça l'aidait peut être à se calmer. Pour le coup.

Il ignora ses paroles. Le traitant mentalement de menteur.
Il concentra a nouveau du vent et aux dernières paroles de Gregory.... Il sentit l'agacement le gagner.

- Blablabla.

Il jouait avec le feu. Clairement. C'était mal et au fond de lui il aurait aimé s'arrêter. Il aurait aimé s'envoler et partir plutôt que de continuer.

- A chaque fois tu fais des grandes menaces et finalement rien. Peut être que tu n'as pas la force de faire autre chose que de gifler ?

A nouveau sa voix tremblotait. Mais tant pis. Il devait faire avec.
Dans le doute il laissa le vent l'entourer. Comme un léger bouclier.

- Faut pas t'etonner si je bois pas. Après ce que tu as fait.

Théophile vit Gregory avancer et se dépêcha de rassembler encore plus d'air. Il devait vite s'enfuir.
Il l'entendit le menacer encore et sentit l'air le soulever tout autant qu'il l'entourait.

Et puis, des mots vinrent à son oreille et il se sentit soudain plus faible. Comprenant ce qui était en train de se passe, Théophile tenta une riposte.

- Mon pou.....voir.....

Ses yeux se fermaient. Avec la crise de panique qu'il venait d'avoir il se sentait fatigué. Mais il ne devait pas dormir. Pas maintenant.

- Vi...Vi. ...... v....

Il ne sentait même plus ce qu'il y avait autour de lui et retomba dans sa chaise. Le silence. Le noir. Il avait tellement sommeil...
Il se laissa emporter et s'endormit brusquement. Épuisé.

Rien que le noir. Surement rêva il mais rien ne lui venait à l'esprit. Sinon le néant.
Néant qui se résulta par un réveil étrange. Parce qu'il n'avait pas eut le temps de voir qu'il s'était endormi.
Il se sentit d'abord réveille avant d'ouvrir les yeux.
Mais se demanda ou est ce qu'il pouvait être. Il ne se rappelait pas s'être couché dans son lit.
Il se rappelait de....
La cave.
La crise de panique.
La suite et.... Théophile ouvrit brusquement les yeux. La tête collé à un sol dur et froid qui le força à se redresser brusquement.

La vision qu'il vit lui laissa un goût plutôt amer en bouche. Et il se sentit mal dès le premier instant. Il avait trop ouvert sa bouche et voilà le travail.
Lassé, épuisé et énervé de ce type qu'était Gregory Hamiton il avait sous estimé ses moyens.
Théophile ne mis pas longtemps à comprendre ou il était.
Et tandis que sa claustrophobie commençait déjà à le rattraper à nouveau il chercha à sentir le moindre air suffisant pour en faire quelque chose avant de comprendre qu'il avait fait une erreur.
Les poings tremblants, Théophile recula jusqu'au mur de la prison dans lequel il se trouvait, assis au sol, et commençant légèrement à sentir le goût amer du regret dans sa bouche.

- ....Oh non....

//Ouais, donc bon... Greg a pas amené Théo au projet shadow, mais dans sa cave qui est toute équipée pour ça et il a mis des sigils/runes pour empêcher que Théo s'échappe//

Voilà... Enfin. Après toutes ses menaces qu'il n'a pas cru, le petit oisillon se rend enfin compte de sa bêtise. Il va regretter d'être revenu ici. Il va regretter de m'avoir énervé jusqu'au point de non retour. Je secoue lentement la tête en l'entendant chanter. S'il pense que je suis assez stupide pour le mettre dans un endroit où il peut pratiquer sa magie, c'est qu'il ne me connaît décidément pas. Il aurait dû en profiter, pendant qu'il travaillait pour moi. Il aurait dû apprendre plus sur qui j'étais et il ne serait pas dans la merde en se moment. Mais le petit oiseau a décidé de se la jouer solitaire et de ne pas me prendre au sérieux. Il dois s'en mordre les doigts maintenant.

-Pas la peine de gaspiller ton souffle à chanter, moineau. Tu es dans une cellule très spéciale, conçu de mes mains. Alors arrête immédiatement. Tu m'as énervé. Je t'ai donné tellement de chance, mais tu as craché sur toute! Tu récoltes ce que tu as semé. J'espère que ça te plaira...

Je souris largement et m'éloigne de la cellule. Je dois commencer par le briser. Et quel meilleur moyen qu'en le laissant poiroter dans sa cellule quelques temps? Je suis certain qu'il va me voir comme un sauveur quand je vais revenir... Je ferme les lumières de la cave avant de fermer la porte derrière moi, laissant mon invité dans son cachot avec un bol d'eau.