Elle aurait dû y songer plus tôt. Cet Institut était bien caché et réservé aux personnes possédant des capacités hors norme. Forcément que connaître son existence ne devait pas être facile pour tout le monde. Elle n'y avait pas pensé parce qu'elle pensait que c'était évident que toute race à pouvoir connaissaient par x ou y moyens cet endroit. En ce qui la concernait, c'étaient ses parents qui le connaissait à la base et qui lui en avait parlé. Mais John avait dû mettre plus d'une décennie pour finalement s'y rendre. Comment avait-il fait avant pour son pouvoir alors ? Est-ce qu'il avait appris à vivre avec à l'aide de ses proches comme elle ? Il avait peut-être appris tout seul. Ou alors s'était contenté de ne pas s'en servir jusque là. Elle hocha la tête à la réponse de l'homme.

- Vous aimez ici ? demanda t-elle finalement.

Oui, elle était une vraie machine à question. Curiosité, quand tu nous tiens. Mais dans ce cas présent, c'était aussi parce qu'elle aimait savoir ce que ressentaient ses proches. Pourquoi ? Pour pas grand chose à part nourrir son empathie envers autrui. La question que ce que l'homme pouvait faire avec son pouvoir, elle, était par contre de la vraie curiosité et le désir d'en apprendre plus sur les pouvoirs des mutants qui semblaient tout de même bien différents de ceux des sorciers. Les mutants se payaient des pouvoirs au hasard et à n'importe quel moment. Les sorciers naissaient directement avec et tous avec des bases identiques. Elle ne se serait pas montré aussi intéressé si les deux races avaient les mêmes types de pouvoirs. Mais si l'invisibilité et le changement de couleur étaient des options amusantes, la demoiselle fut moins radieuse d'apprendre qu'il était capable de brûler les yeux jusqu'au fin fond des rétines.

- Wow...Ca peut être dangereux alors.

Ceci était plus une constatation de sa part qu'une véritable interrogation même si dans le ton employé, elle demandait sûrement confirmation de cette remarque. John trouvait le pouvoir de Melody intéressant. Il devait l'air pour les autres. Pour la jeune fille, c'était pas plus inhabituel que quand elle apprenait une nouvelle langue. Le mutant lui demanda par la suite ces projets d'avenir. C'était une question que d'autres lui avait déjà posé. Mais elle n'était pas encore franchement sûr de connaître elle-même la réponse. En revanche, elle espérait se projeter dans un avenir idéal.

- Je ne sais pas trop. J'aimerais parcourir le monde et utiliser mon pouvoir pour ouvrir les yeux aux gens sur ce qu'ils croient de faux sur les animaux. J'aimerais aller dans des contrées sauvages pour venir en aide à ceux qui sont en dangers aussi et les protéger.

C'est amusant que les adultes pouvaient avoir les mêmes pensées que les enfants face à l'école. John disait qu'il préférait largement être dehors que dans une école. Mais quel enfant ne répondrait pas la même chose ? Peu étaient ceux qui aimaient l'école. Enfin, c'est ce qu'on dit. Parce que John avait probablement l'une de ses exceptions devant son nez. Melody aimait apprendre, et l'école ne lui posait pas de problème. Mais c'est vrai que si l'Institut aurait été à côté de chez elle en Irlande, elle aurait encore plus aimé. Etre séparée de ses parents, ce n'était pas drôle. Surtout qu'elle les voyait déjà pas beaucoup à la base. Maintenant elle était encore plus loin d'eux. Pour le moment, elle l'acceptait bien parce que cela ne faisait pas longtemps qu'elle avait quitté son pays natal. Mais à l'avenir, peut-être que cela finira vraiment par faire un énorme vide dans son coeur.

- Mais les gens seraient tout de même moins dangereux s'ils n'inventaient pas des armes pour faire le mal, vous ne croyez pas ?

Elle ne pouvait pas croire une seule seconde que cet homme soit dangereux. Il était gentil et même si son pouvoir pouvait être dangereux, au fond, ça ne serait que de la mal utilisation comme il venait de le dire. Mais l'homme en lui-même, non, il n'était pas dangereux, elle en était persuadée. Ou plutôt, il n'était pas méchant et c'était plus ou moins pareil. Quelqu'un de méchant était dangereux parce qu'il faisait le mal avec ce qu'il avait. Mais si John n'avait pas de pouvoir capable de nuire, il aurait beau être méchant, il ferait déjà beaucoup moins de dégât.

Comment aider les animaux ? C'était une bonne question et Melody y réfléchissait souvent. C'était dur de changer les mentalités et c'était dangereux de se mettre entre le fusil et l'animal pour le défendre des braconniers. Elle le savait, elle avait vu assez de documentaire sur la question où des défenseurs de la nature qui jouaient les héros se faisaient lâchement assassinés. Quand bien même, elle n'avait pas peur et se trouverait bien des moyens efficaces. Peut-être qu'être sorcière l'aidera dans ce domaine à l'avenir.

- Je ne sais pas trop encore. J'y pense souvent. Mais je suis sûre de trouver un jour !

A son âge, on ne pouvait pas dire qu'elle avait l'influence nécessaire pour agir et défendre ses causes. Mais grâce à son pouvoir, elle se disait qu'elle parviendra sûrement à grandement faire évolué les choses à l'avenir. On avait du mal à protéger les animaux aussi parce qu'on ne les comprenait pas assez et parce que eux pouvaient trop naïfs face aux humains. Alors non, Melody n'avait pas encore d'idée, de solutions, mais elle comptait sur l'avenir pour que ce genre de choses s'ouvrent à elle. Ses parents étaient déjà en eux des personnes avec une certaine influence, avec un père riche et une mère disposant d'un statut, aussi minime était-il dans la société moderne, ce n'était pas des personnes inconnues. Pas dans leur pays d'origine du moins. Mais la jeune fille avait de l'espoir. Beaucoup d'espoir. Si on avait su défendre des races humaines que l'on considérait comme des bêtes jadis -les sorciers, mutants et même les noirs en première ligne- alors il y avait toujours une possibilité que les yeux s'ouvrent pour les animaux. Non pas qu'on les considère un jour comme des humains, mais plutôt qu'on ai une vision plus civilisé d'eux à l'avenir.

- Et vous alors ? Vous venez d'où ? Vous êtes de ce pays ? demanda t-elle finalement pour continuer à assouvir sa soif de savoir envers cet homme.

Un monde de paix n'était pas seulement le rêve des enfants. Mais d'un grand nombre de personne, des populations entières rêvaient de ce genre de monde où la guerre n'existait plus. En grandissant, la jeune fille comprendrait, certes, mais cela ne l'empêchera toujours pas de rêver d'un tel monde. Rêver faisait vivre après tout et tout le monde avait le droit à ça. Après une courte réflexion sur le sujet, Melody offrit un sourire à l'homme avant de répondre :

- Sûrement. Mais ça ne fait pas de mal de voir autre chose que la réalité parfois.

Intelligente, ça elle l'était. Autant dans le domaine de trouver des solutions à des choses que de pouvoir vivre heureuse, dans les rêves et les espoirs, sans pour autant ignorer la cruauté du monde. Le monde n'était pas un beau rêve. Elle l'avait appris dans sa soif de connaissances. Bien qu'elle était encore loin de s'imaginer la réelle dureté du monde, elle savait néanmoins qu'elle existait. Et elle même se disait qu'elle ne pouvait s'autoriser à s'en soucier tant qu'elle ne la comprendra pas totalement. Une sorte de responsabilité qu'elle s'offrait à elle-même. Elle sourit d'avantage au compliment de l'homme. Elle était du genre à apprécier que l'on relève ses qualités, sans pour autant faire grimper un quelconque ego. Par ailleurs, elle acceptait cela mais répondait quand on lui associait des talents qu'elle même ne voyait pas si grands ou particuliers. Elle n'avait pas tellement d'ego en fin de compte. Et elle n'aimait pas plus que les gens autour d'elle se sous-estime.

Américain, elle en était sûr. Mais apparemment de descendance allemande. Elle n'était jamais allé en Allemagne quand bien même elle allait souvent en France qui était juste à côté. Il y avait là-bas sa seconde résidence, la maison de son père, et s'en servait pour des vacances dans la campagne parisienne.

- Et vous avez déjà été dans d'autres pays ? demanda t-elle ensuite.

Par la suite, l'homme lui demanda également ce que faisait ses parents, ce à quoi Melody répondit mais sans plus d'enthousiasme, car c'était bien là la raison pour laquelle, ils n'avaient jamais vraiment eut beaucoup de temps à lui accorder.

- Mes parents sont tous les deux historiens. Ils se sont rencontrés surtout grâce à ce métier qu'ils avaient en commun.

Afghanistan ? Irak ? Melody dû réfléchir un peu pour essayer de voir où se trouvaient ces pays déjà. Ce n'était pas le genre de pays dont elle entendait parler tous les jours. Elle finit par se souvenir qu'ils se trouvaient quelques part dans le sud, entre l'Inde et l'Afrique, sans plus de détail cela dit. Il y avait bon nombre de pays qui traînaient dans ces environs et elle était loin de bien les connaître.

- Oh, c'est loin ça, il me semble. J'avoue que je ne sais plus trop bien où se trouve ces pays.

C'étaient un peu des pays oubliés, si on ne comptait pas les guerres qui les avaient longtemps secoué et qui continuaient encore d'ailleurs. Il y avait énormément de pays, avec un rude passé ou un rude présent qui, pourtant, étaient quasiment invisible aux yeux du monde, généralement parce qu'on en parlait presque pas à l'école par exemple.

- Oui, je suis déjà allé en Angleterre et je suis allée plusieurs fois en France. C'est parce que mon papa vient de là-bas et il a encore sa maison pas loin de Paris. On y va des fois pour les vacances. Quand à mes parents, ils travaillent tous les deux sur les anciennes civilisations de l'Europe celtique dans une période qu'ils appellent la protohistoire.

Même si c'était une de ses passions, la culture celtique, elle ne connaissait pas non plus tous les détails du travail que faisait ses parents. Elle ne donnait à John que ce qu'elle pouvait comprendre sur le sujet. Elle n'avait pas la mémoire des dates par exemple ou d'autres noms trop complexe sur le sujet. Mais elle s'y connaissait tout de même un minimum et elle avait grandi entouré d'ouvrages à la maison sur ce thème.

- Moi même j'aime beaucoup quand ils me parlent de ça. Ca m'intéresse beaucoup ! Et c'est le genre de chose dont on ne parle jamais à l'école.

A l'école, à part les guerres mondiales et la conquête de l'Afrique, on ne parlait pas vraiment d'autres choses ou rarement. De nos jours, les cours d'histoires se résumaient à des cours sur l'économie des pays et rien d'autre. Mais Melody aimait ça aussi car ça lui permettait de passer un peu de temps avec ses parents et de partager les passions.

- Vous aussi il y a des choses comme ça qui vous intéresse dans la vie ? demanda sitôt après la jeune fille.

Pas de cours sur les celtes ? Elle s'en était douté. Mais ce n'était pas trop grave. Elle avait appris à faire avec ce genre de pénurie et puis c'était un peu comme si ses parents lui servaient de professeur dans ce domaine. Elle s'y connaissait déjà assez bien donc il n'était pas nécessaire pour elle d'en avoir d'autres cours en plus. C'est juste que ça aurait rendu l'Institut plus attrayant. De toute façon, elle aura déjà assez bien à faire avec ses autres cours et surtout ceux de la magie. Devenir historienne ? Oui, c'était une idée de perpétrer ce qui ressemblait à une tradition familiale. Les deux parents l'étaient alors pourquoi pas elle ? Qui sait, peut-être qu'en grandissant, c'est effectivement ce qu'elle fera. Elle avait encore le temps de se décider. Les métiers du monde étaient tellement variés qu'elle avait vraiment que l'embarras du choix.

- Vraiment ? fit-elle à la remarque de John, lesquels par exemple ?

Travailler comme ses parents et pour défendre les animaux ? Ca serait chouette, vraiment, mais jamais la jeune fille n'avait vu quelque part que c'était possible ou qu'il y avait des métiers qui se rapprochaient de ça. Mais bon, John devait sûrement savoir de quoi il parlait après tout. C'était lui l'adulte. Elle lui demanda ce qu'il aimait dans la vie mais curieusement, le mutant ne répondit pas tout de suite. Pendant un moment, Melody avait l'impression d'avoir posé la question de trop, d'avoir dit un truc qu'il ne fallait pas. Mais John lui avoua finalement qu'il aimait les armes. Chose étonnante vu la conversation d'avant sur le sujet.

- Des armes ? Oh, j'aurais jamais cru...Vous en avez vous, des armes ?

Généralement, quand on aimait quelque chose, on en avait à la maison. Melody avait, chez elle, des talismans druidiques, des tentures celtiques, des livres sur le sujet. Sur les animaux, elle avait par exemple les chevaux du manoir ou Lancelot, son chien.

- Mes parents m'y ont envoyé, répondit-elle à la dernière question de John, ils me l'ont proposé et je me suis dis que ça serait bien de découvrir un autre pays. En plus, c'est aussi pour perfectionner mes pouvoirs, je ne sais pas encore trop bien les maîtriser.

Ca avait l'air compliqué ces métiers là. Ca traînait davantage dans les branches scientifiques et Melody n'était pas certaine d'arriver jusque là. C'était une idée supplémentaire à ajouter à sa liste au final. Quand le moment sera venu, elle saura sûrement choisir son avenir comme il se doit. A moins tout simplement qu'elle touche un peu à tout, qu'elle essaye, pour voir ce qui lui correspondait le mieux. A voir.

- Je ne connaissais pas, je me renseignerais sur ça alors ! répondit-elle joyeusement.

La question des armes amusa l'homme devant elle. C'est vrai qu'il ne pouvait pas amener d'arme à l'Institut, pour des raisons évidentes d'ailleurs mais en lui posant cette question, Melody pensait surtout à ce qu'il avait chez lui et non pas à l'Institut même si la majorité des personnes intégrant cette bâtisse le faisait jusqu'au bout, c'est à dire y passait un peu leur vie. Cet endroit était pas seulement là pour leur faire cours mais aussi pour les loger et les protéger du monde extérieur et de ces habitants pas encore totalement prêt à accepter l'existence de races à pouvoir parmi eux. Mais John lui annonça qu'il avait tout de même deux ou trois trucs chez son père. Au final, ça répondait tout de même à la question.

- Non pas du tout, ils sont en Irlande ! Enfin, c'est là qu'on habite mais quand ils travaillent, ils voyagent beaucoup.

C'était sûrement le seul truc qu'elle leur reprochait. Enfin non, elle ne reprochait rien à ses parents. Ils faisaient leur travail, c'est tout, ce n'était pas de leur faute. Mais c'était donc la seule chose qui n'était pas très joyeux dans sa vie, ne jamais les voir. Elle s'accouda à la table en y songeant.

- Je ne les voyais déjà pas beaucoup au manoir avant de venir ici...Maintenant je sais que je les verrais encore moins...Vous savez, être historien, ça occupe énormément. Quand ils ne vont pas trop loin, ils m'emmènent avec eux mais la plupart du temps, ils partaient et n'avaient pas de temps pour moi.

Et on se sent vite seule dans un grand manoir perdu au fin fond de la campagne irlandaise. C'est à ce moment là qu'elle avait développé son pouvoir avec les animaux. Elle s'occupait en jouant avec des animaux sauvages qui venaient la voir. C'était sa seule distraction.

- Oui c'est ça ! répondit-il toujours avec enthousiasme.

Le manoir lui manquait mais elle n'était pas triste de vivre à l'Institut. Elle trouvait cet endroit génial et avait encore beaucoup à apprendre de lui. C'était si grand et si bien aménagé. Un fabuleux domaine. Elle ne regrettait pas finalement d'y être et quand ses parents le lui avait proposé, bien qu'elle ai hésité, elle savait que là-bas au moins, elle ne s'ennuierait pas. Tout était bon à prendre pour découvrir ses pouvoirs et il n'y avait pas d'école de ce genre à tout les coins de rue.

- Je n'ai pas peur dehors, fit la demoiselle avec assurance, mais c'est très gentil à vous de le proposer mais surtout ne vous donnez pas cette peine, je ne voudrais pas que vous vous dérangiez pour moi.

On le lui avait appris, à ne pas déranger les grandes personnes pour rien, à ne pas les embêter avec des gamineries, à les respecter et à ne pas abuser de leur gentillesse. Même si ses parents n'étaient que rarement là pour elle, ils avaient su lui transmettre une éducation digne d'une princesse, avec manière et allure qu'il se doit. Elle savait le faire mais en échange, elle savait aussi être fougueuse et aventurière pour compenser tout ça. On ne pouvait pas tout canaliser dans l'esprit d'un enfant et surtout pas sa curiosité, son énergie et son imagination. Elle approuva d'un hochement de tête à la dernière question de l'homme avant d'approfondir :

- Oui j'en ai un, papa me l'a offert pour mon départ à l'Institut ! Vous voulez mon numéro c'est ça ? Tenez, je vais vous l'écrire.

Elle sortit un petit papier de son petit sac ainsi qu'un crayon avant de noter le numéro en question, qu'elle tendit par la suite à l'homme.

Ca, des leçons sur le danger quand on était une petite fille toute seule, elle en avait déjà entendu, de la bouche de ses parents, que tout bon parent doit dire à chaque fois à son enfant, mais aussi de la bouche des profs de l'Institut par exemple. Les adultes avaient toujours le même refrain, mais combien d'enfants les écoutaient réellement ? Une fois encore, Melody se différenciaient des autres parce qu'elle écoutait les adultes et parce qu'elle connaissait ce genre de morale, même si elle n'avait jamais eu aucun soucis en sortant seule.

- Oui je sais, répondit-elle, et je sais être prudente.

Lorsqu'il lui envoya un message, Melody s'empressa de sortir son téléphone pour récupérer le numéro de John.

- Alors ? Devrais-je écrire "John" dans mes contacts, ou "super-héros" ? plaisanta t-elle, malicieuse.

La sollicitude de John était touchante certes, mais elle décida de le taquiner sur le sujet. Bien évidemment, dans son répertoire, c'est "John" qui finit par être inscrit. Elle ne risquait pas de se tromper, c'était pour le moment le seul John qu'elle connaissait. Après quoi, elle rangea son portable dans sa poche.