Nous avions laissé la pourriture derrière nous, la laissant moisir dans sa poubelle minable. Je tenais la main d’Aalyah, un grand sourire aux lèvres. Enfin, aux lèvres, dans ma tête. Parce qu’en vrai, je paraissais plus « troublé » par l’attitude de son frangin.

- Il est tout le temps comme ça ton frère ? Aussi possessif ? … Me prendre pour Lucifer, ce n’est pas un peu bizarre ? Je veux dire… Lucifer, c’est quand même, un démon non ? Et les démons… Ca n’existe pas, si ?

Je m’éclatais. J’aimais mentir, même si je ne mentais pas souvent. Mais là, j’étais bien obligé, non ?
Enfin, je faisais celui qui ne semblait pas comprendre.

- Mais tu es un…hellhound, alors peut-être que je me trompe ?

Son frère jumeau. En fait, je me demandais si je ne pouvais pas non plus apprivoiser le frère, mais la discorde que je pouvais créer entre les deux avait quelque chose de particulièrement attrayant. Je manquais d'éclater de rire quand Aalyah me dit que son frère me voyait partout. C'était merveilleux, si j'avais déclencher une paranoïa chez un autre.
Je fis donc celui qui était surpris d'apprendre pour les démons. J'exagérais à peine ma réaction, parce qu'honnêtement, c'était à mourir de rire.
Soudain, elle m'annonça qu'elle me protégerait des démons.

J'eus une vision en tête. Moi, Lucifer, le roi des Enfers, entrain d'être protégé par une minable chienne contre des démons qui m'obéissent au doigt et à l'oeil s'ils ne veulent pas subir mon courroux. Il m'était vraiment difficile de me retenir de rire, alors j'en profitais pour sourire. C'était déjà ça.

- C'est gentil de ta part... Je ne connais pas grand chose je crois, à "notre" univers, mais je savais que des sorciers existaient sinon.

Puis, j'approchais mon visage du sien :

- Je te protégerais aussi, contre ces démons.

Je m'arrangeais pour être le plus sincère possible, alors qu'en vérité, si Aalyah se retrouvait face à certains des démons que je connais, je la laisserais totalement en plan, admirant de loin, le spectacle d'un joli massacre.

- Mais c'est vrai que ton frère a l'air un peu obnubilé par Lucifer... Et par toi. Je sais que les jumeaux sont proches, mais tu es grande, il ne peut pas te laisser respirer deux minutes ?

Elle avait tant de choses à apprendre de moi. Enfin, « de moi ». De ce que j’inventais de moi. J’opinais de la tête quand à sa question vis-à-vis des sorciers. J’allais encore inventer un truc ridicule, mais de toute façon, je retiendrais mon mensonge, alors je n’avais pas à m’en faire.
Je sentis sa tête contre mon épaule et esquissais un sourire victorieux.
On se protégerait tout les deux hum ? Oh, j’avais hâte de voir ça.

Je souris à son baiser sur la joue. Bon Dieu que c’était mièvre. J’avais presque envie de vomir. Mais que voulez vous, les chiens aimaient montrer de l’affection envers leur maître. Je l’entendis me dire qu’elle ne voulait pas être dans le monde auquel elle faisait finalement partie.

- Je vois…Moi je ne suis pas vraiment dans ce monde non plus. Je sais qu’il existe des autres que moi, mais je préfère vivre ma vie tranquillement.

J’approchais mon visage d’elle, l’embrassant. J’avais compris que ce chien avait besoin d’être caressé en permanence, alors je n’allais pas m’en empêcher, hum ? Cela avait beau relever du niais, je savais que je pourrais m’amuser un peu, plus tard.
Appuyant sur mon pouvoir de persuasion, je susurrais à son oreille :

- Ton frère n’est peut-être pas la meilleure personne à pouvoir se préoccuper de toi…Moi je ferais toujours en sorte que tu te sentes libre…

Lui faire croire que son frère la gardait emprisonné, lui faire croire n’importe quoi, et pousser ses sentiments les plus négatifs au top.

Vivre seul. Je n’étais jamais seul à vrai dire. J’étais toujours entouré, et j’adorais ça. C’était toujours utile d’avoir un siège où s’asseoir, même si celui-ci gigotait et était vivant.
Mes paroles parurent lui faire de l’effet, parce qu’elle reconnu que j’avais raison – normal, j’avais toujours raison. Et elle parla du fait que son frère l’embêtait à être trop protecteur. Cela me plaisait, parce que j’aimais semer la discorde et voir ce que cela donnait ensuite.

- C’est vrai… ?

Je gardais mon visage très proche du sien.

- Ton frère est un peu injuste non… ? Tu le laisses avoir sa vie, mais toi tu n’as pas le droit d’avoir la tienne…

Je frôlais ses lèvres :

- Tu es libre. Et c’est vrai…Nos pouvoirs nous embrasent tous les deux.

Je la serrais contre moi, en restant toujours si proche. Le contact aidait à se faire écouter, aidait à la persuasion. On aimait se faire murmurer à l’oreille, écouter ce semblant de petite voix qui nous susurrait ce qu’on pouvait faire. Enfin « on ». Les humains. Ces crétins.
Même si cette fille n’étais pas humaine, cela revenait au même quand même.

Elle se laissait emporter par mes paroles, les buvant sûrement sans aucun problème. Elle commençait à s’énerver contre son frère sans aucune réelle raison valable, juste parce que je savais entretenir la jalousie et la rancœur. Que je savais faire ressortir l’estime de soi. L’égocentrisme.
Elle me demande si j’aime cette sensation, que l’on soit libre, et peut-être aussi qu’on ait approximativement le même pouvoir.
Je souris, et si mon sourire est carnassier intérieurement, extérieurement, je m’arrange juste pour qu’il paraisse « heureux ».
Nos lèvres sont si proches, et ne cessent de se chercher, s’embêtant mutuellement. Je joue avec ses lèvres, sans jamais l’embrasser complètement, et lui répond :

- J’adore cette sensation…

Je fais agir mon don de persuasion, dans les prochaines paroles qui vont sortir de ma bouche, même si je suis sûr, que je n’aurais pas eut à le faire, tant je démarrais parfaitement :

- Tu devrais t’éloigner de ton frère… Un peu…

Et ensuite, quand son lien avec le détritus sera brisé, je m’arrangerais pour retourner Aalyah contre lui, et pour obtenir son âme à elle…

Je n’avais pas menti, en disant que j’aimais la liberté.
Sauf que contrairement à cette chienne si insouciante, je la possédais. Pas elle. Et je ferais tout pour qu’elle ne la possède jamais. Je l’entendis me dire que ça ne serait pas facile de se séparer de son frère.
Restant proche d’elle, la laissant me caresser, si elle le désirait, allant mordre un peu ses lèvres, je finis par descendre dans son cou, pour murmurer, sous un baiser :

- Ma porte t’es ouverte, autrement…

Je n’avais pas réellement d’appartement, je ne vivais nulle part ailleurs que n’importe où. Je n’avais pas besoin de dormir. Mais je pourrais toujours faire en sorte de m’arranger pour sommer à un de mes démons de me remplacer pour continuer ce petit jeu.

- Je doute qu’il s’excusera…Il semble avoir vraiment le sang chaud…

Ironique, pour un toutou de l’enfer.

- Quel dommage…J’aurais presque bien aimé m’entendre avec mon beau frère…

Pour le jeter dans la déchèterie ensuite.

Jusqu’à ce que ça n’aille plus. Mais ça n’allait plus allons. Là maintenant. Mais je supposais que la chose ne pouvait pas être aussi facile. Je ne comprenais pas pour quelle raison les humains étaient tant attachés à leur famille.
La famille était ce qu’il y avait de plus néfaste pour une personne.

Je la laissais me toucher, laissant ma tête contre son cou, décidant d’y déposer ma marque tandis que suçais sa nuque.
Elle fini par m’embrasser, me parlant encore du détritus.

- Je vois…Je n’ai pas de frère ou de sœur…

J’en avais eut. Il y a si longtemps de ça.
Je me rappelle de leur air confus vis-à-vis de ma réaction face à notre Père. Ca n’était pas des frères et sœurs qui pourraient me protéger, même si certains ont voulu me suivre. C’étaient juste des couillons pas capable d’exprimer plus de chose que le reflet de Celui qui s’occupait de nous.

- Je n’ai jamais eut personne pour me protéger, avant toi.

Enfin si. Les minables abrutis que balançais pour me servir de bouclier. Ceux qui me léchaient les pieds, prêt à tout pour me garder. Ces imbéciles n’avaient même pas été capable de me réveiller, sauf une seule parmi eux.
Cela faisait pitié.
Bref, j’allais chercher sa langue à nouveau, restant collé à elle, mettant fin aux conversations sur son frère.

Je remarquais qu’on n’avait guère bouger depuis notre départ. Mais moi je m’en foutais, tant que mon plan avançait.

Etre là pour moi quoiqu'il arrive. Voilà ce qu'elle me sortit. Je pouvais presque déjà passer un pacte avec elle sans trop me poser de questions. En plus elle me révélais que j'étais la première personne qu'elle aimait comme ça. Bien évidemment, en tant que meilleur coup de l'univers j'attirais à moi les gens sans trop réfléchir.
Elle avait peur de ça, de cet amour tout nouveau ? Elle avait bien raison. Mais Aalyah ne savait pas ce que j'avais derrière la tête. Si elle le savait, elle aurait sûrement eut un peu plus peur.
Nous étions encore collés l'un contre l'autre quand elle me fit remarquer que nous n'avions pas bougé. Tiens, elle le remarquait elle aussi ? A croire qu'elle se réveillait de son amour pour moi.
Mais le fait qu'elle soit encore colle à moi prouvait qu'elle n'était pas prête à se détacher de mon emprise.
Gentil chien.

- Ça veut dire qu'on va être obligé de le croiser ?

Moi ça ne me dérangeais pas en vérité. Il me faisait rire. Mais je devais faire comme si à mes yeux il m'apparaissait un peu dangereux.

- Cachons nous jusqu'à ce qu'il passe et ensuite on rentrera !

Je pris sa main pour l'emmène dans un coin sombre d'une cage d'escalier. Je voyais sans difficulté même dans l'ombre.
Je la regardais en souriant. Riant un peu comme si je trouvais ça drôle. Après. ...c'était un peu drôle mais terriblement. ...puéril ? Et terriblement débile. Ce n'était pas drôle. Sauf pour les imbéciles.