Vous conaissez du sentinellecide ?

Emily et Sytry

 
Aux dernières nouvelles, sortir ne faisait jamais de mal. Tout du moins telle avait été la pensée d’Emily lorsqu’elle avait finalement atteint l’Underground. Il s’agissait d’une boîte jour/nuit qu’elle fréquentait à l’occasion, profitant surtout de l’ambiance détendue qui y régnait. Aujourd’hui, la clairvoyante avait décidé de se laisser un break après ses heures passées à la librairie. Il fallait aussi dire que ses derniers jours avaient été quelque peu mouvementés entre son malaise et la noyade ratée de Zyan. Bon, celle-ci n’avait pas été volontaire de sa part, bien entendu, mais il lui avait quand même causé une belle frayeur. A Lilou aussi sans doute. Finalement, ils s’en étaient tous bien sortis, et la jeune femme se demandait encore comment d’ailleurs. Peut-être que certains miracles existaient. Ou alors ils avaient eu une chance de cocu. Ou peut-être était-ce autre chose… C’était à voir. En tout cas, Emily n’aurait jamais cru qu’elle aurait une vie si animée à Jacksonville. Ce n’était pas pour lui déplaire non plus, mais avoir un peu moins de surprises ne lui ferait pas causé de tort, à son humble avis.

En tout cas, elle savourait ici un soft qu’elle avait commandé auprès du bar. La musique était là, certains danseurs profitaient aussi d’une piste de dance non loin, et la clairvoyante en profitait pour se changer les idées. Ce ne fut que lorsque le DJ changea le type de musiques qu’elle décida de s’éclipser. Il n’était pas encore trop tard, mais les musiques plus rock and roll n’étaient pas tellement son truc et elle n’avait pas envie de les écouter plus que ça.

La clairvoyante n’était pas la seule à partir direction de l’Underground. A l’inverse, de nouvelles personnes y débarquaient, sans doute parce que certains avaient envie de profiter d’un petit moment de détente comme elle un peu plus tôt. Emily atteignit finalement une zone de parking et un endroit plus commercial avant de s’immobiliser brusquement. C’était elle ou elle avait aperçu une tête qui ne qui était pas inconnue ? Sieghart si elle se souvenait bien… Mais son imagination pouvait aussi lui jouer des tours, et la jeune femme ne l’interpella pas tout de suite. Déjà parce qu’il était loin, et puis, parce qu’elle préférait s’assurer que c’était bien lui. Chose qui ne la dérangerait pas tellement, d’ailleurs. En tout cas, il lui avait donné une bonne impression, la première fois qu’elle l’avait rencontré, cela même si ses goûts littéraires étaient quelque peu surprenant quand même. Mais bon. Avec leurs petites piques respectives, ça l’avait bien changée des clients plus rabougris.

Clients qui, de manière générale, s’intéressaient peu aux démons, d’ailleurs. Là encore, Sieghart s’était démarqué à sa façon. Emily se demanda s’il avait trouvé ce qu’il cherchait dans le gros volume qu’elle lui avait passé. Elle n’en savait strictement rien et il était tout aussi possible qu’il ait lu l’ouvrage sans s’intéresser à une thématique en particulier… Cela était resté un choix surprenant quand même, ceux qu’on n’oubliait pas facilement, en tout cas.

Eh bien, ce serait l’occasion de lui demander s’il avait trouvé son bonheur dans ce bouquin-là. A condition qu’elle puisse le rattraper car il avait déjà une bonne avance sur elle. Un instant, Emily envisagea de le suivre simplement, puis, elle décida de suivre une autre méthode. La voix, c’était tout aussi bien pour attirer l’attention. Encore plus quand elle savait comment l’interpeler facilement.

- Hey ! Le démonologiste avec le client fou !

Cela commençait bien si elle l’appelait déjà comme ça, mais Emily ne put contenir un sourire amusé tandis qu’elle regardait si Sieghart l’avait aperçue. Peu aurait sans doute osé l’appeler comme elle l’avait fait, mais la jeune femme n’était pas à ça près.

- Vous avez décidé de quitter vos bouquins pour sortir ? lança-t-elle en élevant toujours la voix.

Il y avait encore une bonne dizaine de mètres à parcourir, mais ce serait vite fait si personne ne se mettait en travers de sa route…

Vous conaissez du sentinellecide ?

Emily et Sytry

 
Emily eut bientôt la certitude qu’il l’avait vue. Mieux, il sembla la reconnaître, puisqu’il poussa un petit rire. Ce ne fut qu’après coup que la clairvoyante se dit qu’elle avait risqué le quitte ou double. A peu de choses près, en tout cas, ça aurait très bien pu ne pas être Sieghart, et de fait, traiter quelqu’un de démonologiste accompagné de l’étiquette « client fou » n’aurait alors eu rien de flatteur. Mais bon. C’était bien lui et ses yeux ne lui avaient pas fait défaut. Et puis, Emily n’avait pas vraiment su résister à la tentation de le surnommer de cette façon. D’une certaine manière, cela leur permettait de rentrer dans leurs piques qu’ils aimaient tous les deux, et il aurait été étonnant que Sieghart ait perdu de sa répartie en si peu de temps. Emily leva d’ailleurs les yeux au ciel avec une mine faussement offensée quand il l’appela de « romantique libraire avec le plus beau client ». Tu parles. Il n’avait pas perdu son côté assuré et narcissique, au moins, c’était quelque chose de clair.

Sieghart rit de nouveau quand elle parla du fait qu’il avait quitté ses bouquins, et Emily l’entendit simplement dire qu’il exposait sa « beauté » aux jeunes femmes qu’il croisait. D’accord. Non seulement il n’avait pas perdu son estime de soi, mais en plus, il n’avait absolument pas perdu son côté Don Juan.

Enfin, le contraire aurait peut-être été décevant.

- M’amuser… Si on veut. Je passais juste prendre un verre à l’Underground pour ce soir, répondit-elle simplement. Histoire de me détendre un peu. Mais je ne m’attendais pas à vous croiser ici, rajouta-t-elle avec un sourire. En fait, à peu de choses près, je crois que j’aurais pu vous passer devant sans vous voir. Il faut croire – et là, son ton devint mi-moqueur, mi-ironique  – que vous éblouissez dans la nuit.

Elle ne croyait pas ce qu’elle disait, évidemment, mais Sieghart ne lui semblait pas non plus trop imbus de lui-même pour ne pas comprendre sa blague et sa pointe d’humour.

En tout cas, elle le rejoignit, et autant l’homme lui adressa un sourire espiègle, autant il fut directement plus dur l’instant d’après. A raison, sans doute. C’était vrai que le quartier où ils étaient n’était pas le plus sûr de la ville, mais Emily haussa les épaules avant de répondre.

– Pour ta gouverne, j’allais de l’autre côté du parking. C’est toi qui va dans des lieux bizarres et loufoques.

Bon, il était vrai qu’il ne l’avait pas obligée à le suivre, mais il était vrai aussi que ce n’était pas les rues qu’Emily avait l’habitude de rencontrer.

Enfin bref. Emily ne put retenir un sourire quand il évoqua leur « chevalier fou » et elle secoua la tête sans cacher son contentement de ne pas l’avoir revu.

- Non. Et tant mieux pour moi ! Je préfère un Don Juan narcissique et désespérant qu’un pauvre perdu qui veut aller s’attaquer à un Sauron imaginaire.

Elle avait dit cela sur un ton peu sérieux, et Emily ne tarda pas à l’interroger à son tour.

- Et toi, qu’est-ce que tu fais ici ? lança-t-elle en jetant un coup d’oeil à la rue déserte. Tu es venu te détendre dans le coin ?

Parce que dans ce cas, il y avait d’autres endroits meilleurs de la ville pour ça, mais bon, à chacun ses goûts, comme on disait aussi.

- Ou alors, tu as une petite amie secrète et tu l’as invitée ici ? le railla-t-elle légèrement, toujours avec le sourire. Même si j’espère que tu me diras non, sinon, ça craindrait un max pour elle ici.

Vous conaissez du sentinellecide ?

Emily et Sytry

 
Sieghart pouvait toujours lever les bras pour clamer son innocence, Emily n’en perdit pas pour autant son sourire moqueur et amusé. Encore plus quand il la titilla sur le fait de boire. Elle leva les yeux au ciel avec une mine faussement offusquée tout en lui renvoyant un « et toi alors ? » sur un ton espiègle.. C’était presque dommage qu’elle sorte d’un bar, tiens, elle lui aurait presque lancé un défi juste pour le plaisir de voir ses résistances à l’alcool.

En tous cas, leurs échanges restaient drôles, ce qui était quand même agréable même si la jeune femme lui promit effectivement de bien faire attention aux coins qu’elle fréquentait. Ce n‘était pas comme si ces quartiers étaient sa tasse de thé de toute façon… Et d’une certaine manière, peut-être que bouger ne serait pas une mauvaise idée plutôt que de rester planqué dans un parking totalement obscur. Il fallait juste voir ce que comptait faire Sieghart, car elle n’avait pas la moindre idée de ce qu’il pouvait faire dans le coin.

Enfin, à l’en croire, il chassait un démon... Mais Emily laissa échapper une moue sceptique.

- Si tu veux mon avis, tu trouveras plus de la racaille dans le coin que des démons, fit-elle. Sauf s’ils préfèrent les lieux mal famés, mais ce serait dommage pour eux, rajouta-t-elle dans un sourire. Après, si tu peux en tuer quelques-uns, je t’en prie, mais ce sera à tes risques et périls, mon cher.

Un sourire plus large naquit sur ses lèvres quand il se tapa la main sur le front et qu’il lui sortit que « le Don Juan Narcisse Désespérant « l’avait bien fait sourire l’autre fois dans la librairie. C’était vrai, elle n’allait pas le démentir. Et puis, bon, Sieghart avait beau avoir de la répartie, il n’était pas désagréable, loin de là même.

- Tu te serais bien plus au XII-XIIIe siècle, toi, le railla-t-elle. Même si se dégourdir les jambes n’est pas un mal. Après, il y a d’autres lieux de Jacksonville à visiter tu sais ? Genre, moins morbide. Et sinon, je rentrais à la maison, oui. Mais quand j’ai vu que tu étais là, je me suis dit que ç’aurait été dommage de passer à côté, fit-elle malicieusement.

Sieghart lui donna ensuite l’avis sur le livre qu’il lui avait acheté. Visiblement, il n’avait pas trouvé ce qu’il cherchait mais le bouquin était potable. Soi-disant que les scènes morbides y avaient été bien présente. Au fond, le Moyen Âge avait eu quelques ressources, à ce niveau-là, et de ce qu’elle avait pu voir de la table des matières, l’auteur avait profité des légendes liées aux démons pour décrire d’autres types de tortures.

- Au moins, s’il t’a plu un minimum, c’est déjà ça… Mais tout ce qui concerne la littérature sur les démons et compagnie est assez vaste, il te faudrait peut-être des documents de référence pour trouver ce que tu cherches. D’ailleurs, tu t’intéresses à quel sujet ?

Si jamais il repassait à la librairie, elle pourrait toujours commander des livres plus précis. Même si ça ne garantissait pas qu’il trouve quelque chose non plus.

Emily l’écouta lui dire ensuite que ce n’était pas un lieu si étrange. Mouais. En journée, très probablement pas, en pleine nuit, par contre, c’était autre chose. Quant à rencontrer un Sauron junior…

- Dans ce cas, tu seras mon preux chevalier et tu me défendras !   lança-t-elle sur un ton espiègle avant d’avoir son attention attirée par une silhouette derrière Sieghart. Elle ne l’avait pas vu apparaître d’une des maisons ou d’un coin de la rue. Peut-être était-ce la clairvoyante qui n’avait pas fait attention, mais quand cette même silhouette se dirigea vers eux, Emily fronça des sourcils en se retournant vers Sytry. C’est un ami à toi, ou c’est... un type bizarre qui aime aborder les inconnus ?

Elle aimait bien ses conversations avec l’homme devant elle, mais s’ils pouvaient éviter que les alcooliques ou les types nocturnes du quartier s’invitent dans leur discussion, elle ne dirait franchement pas non.

[J’espère que ça te va pour la sentinelle ^^]

Vous conaissez du sentinellecide ?

Emily et Sytry

 
Quand Sytry lui demanda si elle avait de la sympathie pour les démons, Emily faillit ouvrir la bouche pour dire non, d’autant qu’elle n’en avait jamais rencontré à sa connaissance. Par contre, elle ne put s’empêcher d’entrer son jeu lorsqu’il parla de son « charme irrésistible ».

- Tu parles, j’attends de voir ça, fit-elle avec un ton malicieux. Tu risques plus de les rendre fous avant de commencer, rajouta-t-elle  pour plaisanter.

La jeune femme l’écouta ensuite lui demander si elle l’invitait à une virée d’enfer. Vu la taille de la ville, il y avait toujours moyen d’improviser quelque chose, et Emily aurait bien été capable de le prendre au mot. Elle connaissait mieux la ville qu’au tout début de son arrivée, en tout cas, et de toute façon, les bars étaient souvent actifs en soirée. Faire demi-tour pour aller à l’Underground aurait même été possible, la protection qui entourait l’établissement ne semblant pas un problème pour la jeune femme.

Elle le laissa néanmoins dire son avis sur les livres qu’il avait acheté, et quand il lui sortit que c’était juste un « délire » pour simplement trouver des informations sur les démons, Emily n’insista pas. De toute façon, s’il voulait d’autres bouquins sur le sujet, il savait où la trouver et au pire, il pourrait  toujours aller dans des librairies spécialisées...

Quant à l’itinérant qui avait tenté de les aborder, Emily ne comprit pas très bien pourquoi il s’arrêta brusquement de beugler et de faire prestement demi-tour, mais elle n’allait pas s’en plaindre. Ce n’était tout du moins pas le genre de personnes qu’elle avait l’habitude de fréquenter.

- Eh bien, il faut croire que ce sera pour une prochaine fois. Mais ça se peut que tu n’y échappes pas un jour, je te préviens ! fit-elle avec un certain sourire tout en voyant Sieghart poser sa main sur sa poitrine. Elle s’inquiéta par contre plus franchement quand il se mit à tousser brusquement sans prévenir. Aux dernières nouvelles, il ne semblait pas malade… Et c’était une genre de toux qui ne lui paraissait pas normale. Sieghart, qu’est-ce qu’il y a ? s’alarma-t-elle tandis qu’il était plié en deux. Tu as un…

Sa voix mourut dans sa gorge par manque d’oxygène dans ses poumons. L’espace d’une seconde, Emily ne comprit pas ce qu’il lui arrivait. Elle s’était plus préoccupée de se rapprocher de son ami pour l’aider à se redresser et à voir ce qu’il se passait. Au fond, peut-être avait-il une maladie qui se manifestait avec des crises : c’était en tout cas ce qu’elle avait pensé en mettant sa main sur l’épaule de Sytry. Jusqu’à ce qu’elle ressente elle aussi le manque d’oxygène. Un manque bien désagréable, et ma foi, de plus en plus alarmant au fur et à mesure du temps qui passait.

Passant son autre main vers sa gorge, Emily essaya rageusement d’inspirer de l’air dans ses poumons. Bordel, qu’est-ce qui leur tombait dessus cette fois ? Le destin pouvait pas se contenter d’un client totalement tapé qui voulait chasser Sauron ? C’était une situation qui paraissait presque normale, quand on regardait celle où ils étaient actuellement. Mais genre, ils avaient la poisse, ou c’était quelque chose d’inné chez eux ?

Malgré tous ses efforts, il n’y avait rien qui daignait entrer dans ses poumons, et Emily sentait de plus en plus son corps faiblir. Se révolter surtout. Son organisme n’appréciait absolument pas le traitement qu’elle lui faisait involontairement subir, et la jeune femme comprit rapidement que si cela continuait comme ça, elle allait s’étouffer ou au minimum s’évanouir.

Dans des conditions plus normales, Emily aurait peut-être laissé échapper un rire nerveux. Fucking les évanouissements et les malaises, elle avait eu son compte et elle ne retournerait pas à l’hôpital. Surtout qu’elle doutait qu’un sauveur surgisse comme ça par magie. Phen avait bien été là la première fois, mais elle ne comptait pas sur la chance pour qu’il apparaisse au détour du quartier et prenne les choses en main à nouveau.

Et puis, ça l’aurait fait chier, bordel. Et en fait, ça la faisait déjà chier, ce manque d’oxygène.

Quoi qu’il en soit, elle chercherait les causes plus tard : en attendant, ils devaient quand même agir pour sauver leur peau. Elle ne pouvait pas utiliser sa voix, il lui fallait donc autre chose pour qu’ils s’en sortent. Pas son pouvoir, sa clairvoyance leur serait très peu utile, en l’occurrence… Bouger aurait été le mieux, mais leur corps manquait trop d’oxygène pour qu’ils changent d’endroit en courant ou en utilisant leurs capacités physiques.

A situation désespérées, mesures désespérées, cependant. En serrant les dents, à défaut de respirer, Emily essaya d’attirer l’attention de Sytry et de lui pointer le bout de la rue. Peut-être que là-bas, le manque d’oxygène ne s’appliquerait pas… Mais il fallait seulement y arriver, ce qui était loin – trèèès loin – d’être gagné.

Vous conaissez du sentinellecide ?

Emily et Sytry

 
Respirer était a priori un acte simple. C’était un réflexe biologique presque inné chez tout être vivant, et aux dernières nouvelles, la Terre n’était pas prête de manquer d’oxygène. Qu’Emily ait donc la sensation d’étouffer était particulièrement désagréable. Plus encore quand cela vous tombait dessous sans prévenir et sans que ça n’ait aucune logique. Encore, s’ils avaient été dans un milieu très fermé, ça aurait pu se comprendre… Mais en plein air ? Dans un parking rempli de voitures ? Non, ça n’avait pas de sens, et il fallait être honnête, la clairvoyante s’acharnait à récupérer un peu de souffle avant que son corps ne tienne vraiment plus le coup.

La volonté pouvait parfois faire des miracles, mais ce fut plutôt l’action de Sieghart qui les sauva. Trop surprise et surtout trop affaiblie pour réagir comme elle l’aurait fait en temps normal, Emily le vit faire du bouche à bouche avec elle après l’avoir mise au sol. Bon, quelque chose de relativement facile, comme elle déjà quasi à genoux à cause du manque d’oxygène. Et du reste, le procédé de Sytry restait quand même efficace, encore que c’était bien à cause des circonstances qu’il ne s’était pas pris une gifle en pleine figure.

Tout comme le démon s’activait à faire fonctionner son corps, Emily suivit le même chemin, s’efforçant de faire abstraction de tout son organisme qui demandait bien plus d’oxygène qu’il n’en avait pour le moment. Ce fut enfin lorsque tout redevint à la normale qu’elle reprit brusquement une grande goulée d’air, donnant enfin à ses poumons ce qu’ils réclamaient à grand cri.

Se redressant à demi sur le côté, il fallut plusieurs inspirations à la jeune femme pour calmer son rythme cardiaque et ravoir suffisamment d’oxygène.  Et de fait, elle ne fit pas tout de suite attention à Sytry qui s’était laissé rouler sur le macadam du parking. Elle l’entendit néanmoins lui demander ce qu’il s’était passé, et la jeune femme ne put que secouer légèrement la tête face à sa question.

- Si je le savais, je crois que je me serais pas gênée pour faire la peau au responsable avant, avoua-t-elle.

S’il y avait un responsable… Mais les manques d’oxygène subis n’étaient pas vraiment des phénomènes naturels non plus. A dire la source de tout ce bordel, par contre, c’était encore autre chose.

Emily ne put s’empêcher d’avoir un léger rire nerveux lorsque Sieghart lui sortit qu’elle avait été chanceuse pour avoir eu l’occasion de l’embrasser. Elle se leva tandis qu’elle lui répondait et se tournait vers lui.

- Et toi, estime-toi heureux de ne pas avoir reçu la gifle de ta vie, rétorqua-t-elle avec un demi-sourire, sur un ton déjà un peu plus malicieux quoiqu’encore un peu tendu. Mais bons réflexes, je le reconnais. Et toi, tu vas bien ?

Dans une certaine mesure, s’ils parvenaient encore à s’envoyer des petites piques, c’est qu’ils étaient toujours vivants, et pas à l’agonie, non ?

- Du coup, ce n’est pas tout ça, mais je te propose de bouger, fit la clairvoyante en s’adossant à une voiture derrière elle et en passant les mains derrière son dos, au niveau de la poignée d’une des portières. Sauf si tu raffoles des brusques trous d’oxygène, mais alors, ce sera sans moi.

Au fond, Emily doutait qu’il veuille rester là, et ce fut lorsqu’elle se redressa véritablement qu’elle entendit un déclic derrière elle. Un peu surprise, la jeune femme se retourna et constata avec une certaine consternation que la portière derrière elle était ouverte.

Sans blague. Ils devaient prendre ça pour un petit miracle ou pour un cadeau du diable ?

Emily contempla un instant la voitureavant de se tourner vers Sieghart.

- Tu sais trafiquer une voiture ?

Question pleine de sous-entendus et surtout pas très catholique, mais bon, il fallait bien qu’ils arrivent à quelque chose et filent loin d’ici non ?

Vous conaissez du sentinellecide ?

Emily et Sytry

 
Qu’il la taquine n’étonna pas vraiment Emily. A dire vrai, le contraire aurait été étonnant, mais pour apprécier pleinement le baiser de Sieghart, il lui aurait fallu de l’oxygène dans les poumons. Elle ne rétorqua cependant rien, cette fois, se concentrant sur la voiture malencontreusement ouverte.  Dans un sens, cela la faisait bien chier et de l’autre… S’ils manquaient de nouveau d’oxygène, ils pourraient bien aller cette fois dans la tombe, si le phénomène durait plus longtemps que la dernière fois.

Si la voiture était donc une alternative, cela ne l’empêcha pas de le fusiller du regard quand il se mit à éclater de rire face à ce qu’elle sous-entendait. Ce n’était pas drôle d’abord. Et elle n’était même pas rebelle ! Juste… pas assez folle pour vouloir de nouveau s’étouffer par elle ne savait quoi. Et donc, la voiture, comme elle n’avait pas la sienne, c’était très bien !

- Je suis pas rebelle, grommela-t-elle d’une voix presque boudeuse, je suis… pratique et efficace ! fit-elle, défiant presque Sieghart de la contredire, ce qui était quand même possible, vu leur caractère respectif.

Ceci dit, son camarade de fortune semblait quand même savoir comment faire, puisqu’il se mit à la place du conducteur avant de se mettre à faire des bricoles dont Emily ne connaissait absolument rien. Après, ce n’était pas comme si elle était fan de mécanique, et « qu’emprunter » une voiture autre que la sienne lui avait un jour traversé l’esprit. Jusqu’à aujourd’hui, quoi. Mais bon, qui était tout blanc ou tout noir, aussi ?

Finalement, la voiture se mit en marche, et après avoir vérifié qu’il n’y avait personne, Emily entra dans l’automobile tandis que Sieghart lui lançait un clin d’oeil et lui proposait d’applaudir son habilité. A ses paroles, un sourire moqueur apparut sur son visage tandis qu’elle tournait son regard vers lui.

- Je ne te demanderai rien, d’accord. Par contre, Sherlock, j’applaudirai seulement quand tu auras démarré et qu’on sera loin !  

Et que rien ne leur tomberait sur la figure aussi, ce qui se présenta plutôt bien jusqu’au lave-auto. Le car-wash n’était pas ce qui dérangeait vraiment Emily, d’autant qu’elle avait aussi aperçu la police via le rétroviseur à côté d’elle. C’aurait été délicat s’ils les avaient abordés, et dans le fond, Sieghart avait eu le bon réflexe en allant conduire la voiture là.

- On peut toujours abandonner l’auto-là… Son propriétaire la retrouvera toute propre, ainsi…

Plan simple, rapide, efficace, sur lequel ils n’auraient rien eu à perdre, finalement. Sauf que bien sûr, cela aurait été trop facile, et Emily fronça des sourcils quand Sieghart lui demanda si le lavage ne durait pas plus longtemps que prévu. Oui ? Non ? Peut-être ? Elle observa un instant le comportement du lavage en lui-même dut bien admettre que l’eau était un peu trop présente à son goût.

- Je confirme, il y a un truc qui cloche. Tu sais bouger les fenêtres ? Ou ta portière ?

Dans le doute, elle vérifia elle-même et la clairvoyante retint difficilement un juron quand un bruit de verrouillage se manifesta sans prévenir. Ils ne pouvaient pas sortir. Génial. Merveilleux, même. Ils avaient tellement rêvé d’être enfermé au sein d’un car-wash ! Et plus encore d’avoir une inondation à l’intérieur de la voiture !

Sans déconner, il fallait pas se foutre du monde non plus.

- Dis, tu crois qu’on est maudit, ou que c’est un jour foireux où tout a décidé d’être contre nous ?

Son ton était faussement détendu tandis qu’elle analysait un peu la bagnole de laquelle ils devaient s’extirper. Son propriétaire devait quand même être assez aisé, puisqu’il avait presque droit à une décapotable. En tout cas, ils pouvaient voir une vitre au-dessus d’eux, et Emily essaya d’actionner les boutons pour ouvrir l’automobile. Un seul répondit, et ce fut celui de la vitre au-dessus d’eux. Mais autant cette dernière daigna s’ouvrir au début, autant elle s’immobilisa alors qu’il y avait encore deux tiers de la paroi qui ne s’était pas rétractée à l’intérieur du véhicule.

Pas assez pour sortir, en somme, mais largement suffisant pour qu’ils reçoivent une chute d’eau en pleine tronche.

Emily resta silencieuse une seconde avant de se jeter un coup d’oeil et puis de regarder Sieghart, qui avait peut-être eu son compte aussi en termes de douche froide improvisée.

Huuum, bon, le car-wash n’avait peut-être pas été une si bonne idée que ça finalement

- … C’était pour te remettre les idées en place ? Histoire que l’un de nous ait une idée lumineuse, je sais pas ?

Il fallait bien dédramatiser un peu, même si pour le coup, tout son visage et une partie de ses vêtements étaient trempés. Ils avaient même droit à une chute d’eau constante par la vitre, maintenant, et Emily vérifia, celle-ci refusa de se refermer vraiment.

Booon.

- Reste là, je reviens.

Il y avait peu de chances qu’ils accèdent au coffre, mais elle pouvait toujours regarder s’il n’y avait pas quelque chose d’intéressant à l’arrière. La seule chose qu’elle trouva, cependant, fut un extincteur et elle le saisit avant de le lancer à Sieghart avec une légère moue désabusée.

- Si trouves un moyen pour sortir de là, je te promets que j’applaudis.